Recours préventif et lutte contre l’indignité des conditions de détention : quelles pistes d’amélioration ?

Eric SENNA.

Avoir à prendre la parole en fin de colloque peut se révéler un exercice aventureux. En effet, alors que l’attention des participants commence à faiblir après l’enchaînement des exposés toujours très riches des intervenants précédents, il me faut à cet instant, en étant fidèle à la lettre de mission qui m’a été confiée, essayer de dégager des perspectives d’amélioration du recours préventif.

En complément de la présentation très complète de M. Dumortier sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale, il m’appartient donc de vous proposer quelques lignes directrices visant au renforcement de la lutte contre l’indignité des conditions de détention.

Le trait dominant de la matière des conditions de détention est qu’elle est marquée par un faible degré de compliance. C’est dire qu’il y a actuellement peu de processus efficaces mis en œuvre en interne par les administrations pour garantir l’absence de violation du principe de dignité, ce qui peut expliquer le développement du contentieux autour de ce sujet.

Mon propos s’articulera autour de trois axes de réflexion :

1° Les pistes que j’ai choisi d’intituler « scientifiques » qui permettront une amélioration de la connaissance des conditions de détention.

2° Les pistes visant à une optimisation des conditions d’exercice du recours.

3° Enfin, les pistes juridiques qu’elles soient de nature jurisprudentielle ou législative, tendant au renforcement de l’efficacité du recours.

1. Les pistes scientifiques permettant une amélioration de la connaissance des conditions de détention.

Le constat peut être fait que si les acteurs du recours disposent d’un certain nombre de données quantitatives relatives à l’occupation des établissements pénitentiaires, celles-ci sont incomplètes.

En revanche, il y a peu de recueil d’éléments qualitatifs. Autrement dit, grâce aux statistiques fournies par l’administration pénitentiaire, nous pouvons connaître pour un établissement donné :

– son taux de densité carcérale,

– le flux des entrées et sorties,

– la répartition prévenu/condamné,

– le nombre de matelas au sol en cellule collective.

Si ces indicateurs sont bien sûr essentiels pour apprécier la situation d’ensemble, d’autres font manifestement défaut.

Le recueil d’autres données quantitatives. La connaissance de l’état immobilier de la détention apparaît perfectible. Ainsi pour chaque établissement, combien de cellules occupées collectivement ne respectent pas les normes minimales de 3 ou 4 m2 disponibles par détenu ? Nous l’ignorons. Combien de cellules sont impactées par la vétusté et/ou l’insalubrité ?  Nous l’ignorons aussi. Combien de cellules disposent de douche individuelle et de toilettes fermées ? Nous l’ignorons tout autant en sachant que ces données sont par nature évolutives.

Plus largement, cela renvoie à certaines des recommandations résultant de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) JMB et a. c/France du 30 janvier 2020 qui aura souvent été évoqué au cours de cette journée.

Les juges de Strasbourg ont appelé à une refondation des modes de calcul de la capacité d’accueil de nos structures carcérales.

Sur ce point, les autorités françaises maintiennent le statu quo. En effet, dans le dernier plan d’action qui a été présenté en septembre 2022 au Conseil des ministres du Conseil de l’Europe dans le cadre du suivi de l’exécution de cet arrêt, celles-ci indiquent que : « § 122 – La mise en œuvre d’un nouveau dispositif de calcul tel que recommandé ne conduirait pas à réduire le nombre de détenus (…) n’aurait aucun effet sur les conditions de détention (…). § 124(…) l’exclusion de l’espace sanitaire estimé à environ 1m2 n’aurait qu’un effet très limité, voire nul sur la capacité des établissements pénitentiaires ».

Le Conseil des ministres n’a pas été convaincu par cette argumentation puisque dans sa décision du 8 décembre 2022, il rappelle à l’Etat français que la CEDH ne s’est pas limitée à recommander la refonte du mode de calcul des capacités mais a aussi préconisé « l’amélioration de son respect ».

Un des points d’achoppement est relatif à l’espace occupé par les sanitaires en cellule qui devrait être exclu du calcul de la surface disponible comme le recommandent d’ailleurs, depuis longtemps le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) et le Contrôle Général des lieux de privation de liberté (CGLPL).

Le recueil de données qualitatives

Mais ce qui pêche le plus, c’est bien l’absence de données qualitatives sur les conditions de détention et sur ses conséquences défectueuses sur la qualité de la réponse pénale. Ainsi, parait-il indispensable de mieux mesurer et appréhender l’indignité des conditions de détention et pour cela de pouvoir disposer d’outils de comparaison inter établissements en établissant des scores entre eux. Ce qui est perçu intuitivement par de nombreux professionnels comme par exemple, l’influence de ce facteur sur la récidive, reste à démontrer.

Comme cela a déjà pu être réalisé à l’étranger, la définition du lien entre récidive et conditions de détention doit être affiné par des recherches menées sur les facteurs de récidive par l’analyse des correspondances multiples. (ACM – méthode statistique qui permet de résumer l’information provenant de multiples variables).

De la même façon, existe-t-il des corrélations entre conditions de détention et prévention du suicide et avec le développement des violences en détention ?

Si certaines études universitaires ont débuté, à ma connaissance aucune ne l’est à l’initiative du ministère de la Justice.

La dernière étude conduite en juillet 2021 par Mesdames Cornuau et Juillard, statisticiennes au ministère de la Justice sur les déterminants de la récidive dans la première année de la sortie, ne contenait pas d’exploitation de cet item alors que la variable « choc carcéral » y figurait.

Sur ce sujet, je me permets d’évoquer la défunte proposition de loi relative à la lutte contre la récidive déposée en février dernier à l’Assemblée Nationale par le groupe Horizons qui partait du constat d’une hausse continue de la récidive depuis trois ans.

Après le rejet de son article premier en faveur d’une réintroduction des peines planchers pour certaines infractions commises contre les fonctionnaires d’autorité, cette proposition a finalement été retirée par ses auteurs le 2 mars dernier.

Mais, ce texte prévoyait également en son article 5, l’organisation d’une seconde conférence de consensus de lutte contre la récidive, une décennie après celle qui s’est tenue en février 2013 à l’initiative de Madame Christiane Taubira.

Il est intéressant à cet égard, de relever que, dans l’exposé des motifs, les parlementaires s’interrogeaient expressément sur des conditions d’incarcération en état de surpopulation carcérale comme vecteur possible de récidive.

2. Les pistes visant à une optimisation des conditions d’exercice du recours.

I – Alors que certains redoutaient un raz de marée de recours lors de l’entrée en vigueur de la loi du 8 avril 2021 le 1er octobre 2021, force est de constater, que dix-huit mois plus tard, celui-ci ne s’est pas produit.

D’ailleurs, après le revirement de la chambre criminelle opéré par un arrêt du 8 juillet 2020, évoqué ce matin par plusieurs intervenants, qui a consacré de manière prétorienne le recours préventif pour les personnes placées en détention provisoire, le constat fut identique.

En effet, bien que le dispositif jurisprudentiel qui s’est appliqué pendant plus d’un an, ait été plus simple à mettre en œuvre que celui résultant de la loi, les saisines des juges de la liberté et de la détention (JLD) pour ce motif sont demeurées très modestes, ainsi que l’a rappelé M. Sansen.

Pourtant nous le savons, les motifs de recours trouvant leur origine dans la surpopulation carcérale qui prévaut en maison d’arrêt existent bien.

Parmi, les causes de désaffection du recours contre l’indignité des conditions de détention, il est aisé de repérer, comme cela a été mis en lumière par M. le Bâtonnier Dunac et ainsi que le Conseil des ministres du Conseil de l’Europe n’a pas manqué de le souligner, l’absence totale de prise en charge financière de l’assistance judiciaire du requérant par un avocat au titre de l’aide juridictionnelle.

Ce n’est pourtant pas faute tant pour le Conseil national des barreaux que pour la Conférence des bâtonniers, d’avoir porté cette demande au plus haut niveau.

C’est éminemment regrettable car il s’agit là de l’effectivité même des conditions d’exercice du recours pour assurer le respect d’un droit constitutionnel fondamental et absolu.

Mais c’est aussi un frein puissant pour les personnes détenues qui pour nombre d’entre elles ne disposent pas des moyens de financer leur défense.

Voici donc une première proposition assez simple finalement à mettre en œuvre, il suffirait pour cela de quelques lignes dans un texte réglementaire, quitte à ce qu’il soit posé quelques verrous pour éviter les saisines abusives mais nous sommes bien loin !

IIUne seconde proposition consiste à fournir aux différents acteurs du recours préventif des éléments objectivés et indépendants de ceux que doit produire l’administration pénitentiaire dans le cadre de la procédure de l’article 803-8 du code de procédure pénale (CPP).

Le CGLPL s’est engagé résolument dans cette voie qui me semble assez prometteuse.

Mme Dominique Simonnot, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté avait annoncé en 2021 lors de la présentation de son rapport d’activité, la rédaction par le CGLPL de « fiche prison » centrée sur les conditions matérielles de détention.

Il s’agissait, pour cette autorité administrative indépendante, de mettre en place un nouveau dispositif de contrôle, s’apparentant à une visite thématique d’un établissement pénitentiaire.

Après quinze ans de visites, quel que soit le Contrôleur Général, jusqu’alors cela n’avait pas été mis en œuvre, même si la loi du 30 octobre 2007 ne l’exclut pas.

En effet, traditionnellement, les visites du CGLPL visent l’intégralité de la structure et l’ensemble de ces activités.

Ici, l’idée est donc de réaliser des visites centrées sur les conditions matérielles de détention qui seront moins longues et dont les rapports de visite seront plus courts.

Surtout, ces rapports seront disponibles plus rapidement pour pouvoir être produits devant le juge saisi d’une action contentieuse.

Je rappelle que l’article R. 249-24 CPP fait référence aux rapports du mécanisme national de prévention et du CPT que le juge peut consulter et utiliser dans le cadre de ce contentieux.

Ce nouveau mode de visite devrait tendre à une objectivation des conditions réelles de détention.

 Ces rapports viendront compléter les éléments que l’administration pénitentiaire est de tenue de fournir au JLD ou au juge de l’application des peines (JAP) saisis d’un recours sur le fondement de l’article 803-8 CPP.

Le CGLPL a mis au point une grille d’analyse particulière qui contient de nombreux items tels que : les conditions matérielles quotidiennes, le temps moyen passé hors cellule, la qualité de la préparation à la sortie, la prise en charge dans les quartiers spécifiques (arrivant, isolement et disciplinaire), la connaissance des lieux par les autorités etc…

Cette expérimentation a été débutée à l’automne 2022 dans plusieurs établissements pénitentiaires comme le souligne le CGLPL dans son dernier rapport d’activité.

L’article R. 249-24 CPP prévoit aussi au stade de l’examen au fond de la requête que le juge peut recourir à plusieurs mesures d’instruction.

En pratique, celui-ci ne le fera que s’il existe une contradiction entre les éléments que produits l’administration pénitentiaire et ceux qui sont fournis par le requérant.

Dans ces conditions, un rapport extérieur ciblé émanant d’une institution spécialisée et indépendante peut s’avérer fort utile pour décrire précisément les conditions d’incarcération prévalant au sein de l’établissement où l’intéressé est détenu.

Je ne doute pas que d’ici quelques temps, le CGLPL mette en ligne ce type de rapport sur son site internet. L’objectif-cible qu’il s’est fixé étant de conduire environ 20 visites par an de ce type.

3. Enfin, il ne nous reste plus qu’à aborder les pistes juridiques qu’elles soient de nature jurisprudentielle ou législative, tendant au renforcement de l’efficacité du recours.

Du côté de juge administratif, des évolutions sur l’office du juge des référés pourraient être envisagées et sont appelées de leurs vœux par plusieurs auteurs en doctrine.

Mais de ce que nous ont dit aujourd’hui Mme Schmitz et M. Quinquis, ceux-ci sont peu optimistes sur un élargissement à court terme du référé-liberté en matière pénitentiaire.

Il est d’ailleurs notable de relever que le Conseil d’Etat, alors qu’il en a eu l’occasion à plusieurs reprises après l’arrêt JMB, n’a pas modifié d’une virgule sa jurisprudence notamment sur la définition restrictive qu’il donne aux mesures susceptibles d’être exécutées à bref délai.

Le fait que le juge français à la CEDH soit un ancien conseiller d’Etat qui a largement contribué à l’évolution de la jurisprudence de cette juridiction en matière pénitentiaire, n’a pas été un élément dynamisant du dialogue entre ces deux juridictions.

Néanmoins, ainsi que l’a relevé la CEDH dans l’arrêt JMB, il existe un point sur lequel un effort particulier pourrait être développé par le juge administratif : il s’agit de la réduction des délais d’instruction des procédures qui tendent à l’exécution des injonctions prononcées par le juge des référés.

Cette durée, qui peut se compter en années, est manifestement contreproductive et peut se heurter au principe du délai raisonnable, s’agissant de mesures qui par nature doivent être exécutées à bref délai.

Le président de l’Observatoire international des prisons nous a expliqué que, pour ce motif, son organisation envisageait en désespoir de cause, de former des recours en indemnisation afin de faire bouger les lignes sur la question du suivi de l’exécution des décisions de référé-liberté.

Du côté du juge judiciaire, en premier lieu, parmi la petite dizaine d’arrêts publiés rendus par la chambre criminelle depuis l’entrée en vigueur de la loi, il me faut citer une décision importante rendue le 16 novembre 2022.

Celle-ci a en effet admis indirectement, puisque ce n’était pas l’objet du pourvoi, que le champ d’application de l’article 803-8 CPP n’était pas limité aux conditions matérielles de détention.

Elle a considéré qu’il comprenait aussi des atteintes à la dignité ne résultant pas d’une problématique immobilière.

En l’espèce, il était invoqué par le requérant des violations de l’accès aux soins et résultant de l’application d’un régime sécuritaire de détention.

La lettre du texte autorise cette interprétation, laquelle se réfère aux seules « conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine ».

D’ailleurs, l’importante jurisprudence de la CEDH rendue sur le fondement de l’article 3 de la Conv. EDH en milieu carcéral foisonne d’illustrations où la question des conditions matérielles de détention ne se posait pas en tant que telle ou bien se combinait avec d’autres atteintes à la dignité.

Dans ce cas, une fois la violation constatée par le juge, elle devra être corrigée « par tout moyen » (art. 803-8 I, al. 5 CPP). La mesure corrective apportée par l’administration pénitentiaire sera alors une mesure autre que le transfèrement, à savoir toute mesure qui lui paraît appropriée pour mettre fin aux conditions de détention en cause (art. R. 249-22 CPP).

Cette interprétation est aussi conforme à l’article 13 Conv. EDH sur l’exigence du recours effectif.

Par contre, elle recèle des perspectives nouvelles de contentieux qui sont traditionnellement l’apanage du juge du contentieux de l’excès de pouvoir. Le développement de compétences concurrentes entre les deux ordres de juridiction relance la question qui se pose en filigrane d’un juge unique de la détention.

Une autre question qui n’est pas encore tranchée est celle qui tient à la différence de régime applicable au prévenu et au condamné.

Celle-ci pourrait être atténuée par la jurisprudence à venir. Je vous propose de prendre un exemple pour illustrer mon propos : une fois que le juge a considéré que le détenu se trouvait dans une situation d’indignité, seul celui ayant le statut de condamné peut s’opposer légitimement à son transfèrement proposé par l’administration pénitentiaire.

Ce refus pour être jugé légitime doit être motivé par le fait que le transfert est susceptible de lui causer une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale.

C’est ici le principe du maintien des liens familiaux qui est en cause.

Par contre, pour le prévenu, rien de tel n’a été prévu.  Celui-ci pourra donc être transféré à une autre extrémité de la région pénitentiaire dont relève l’établissement où il est incarcéré et même hors de cette région.

Cela reste possible, comme nous l’a confirmé précédemment M. Alves, sans que son refus aux termes de la loi puisse être considéré comme légitime.

Cette différence de traitement s’accentue avec le fait que s’il entend contester la décision de transfert, son appel devant le président de la chambre de l’instruction n’est pas suspensif contrairement à l’appel formé devant le président de la chambre de l’application des peines par le détenu condamné.

En pratique, cela veut donc dire que l’ordonnance du JLD pourra être mise à exécution immédiatement puisqu’elle est exécutoire par provision, ce qui privera l’appel de son intérêt.

On mesure ainsi le fort effet dissuasif que ces restrictions peuvent avoir pour un prévenu qui voudrait se plaindre de ses conditions de détention.

Dans ces conditions, le juge judiciaire pourrait être amené à répondre favorablement à une question prioritaire de constitutionnalité qui lui serait posé sur le point de savoir si ce dispositif législatif est conforme à la Constitution.  De même, celui-ci pourrait également être conduit à unifier par le haut ces régimes entre eux à l’occasion d’un contrôle de conventionnalité du dispositif au regard des dispositions des articles 8 et 13 Conv. EDH.

Il nous reste maintenant à explorer les pistes de réforme textuelle. Bien que nombre de propositions de loi sont souvent sans lendemain, il en est une qui mérite notre attention puisqu’elle vise à la mise en place d’un mécanisme de régulation carcérale par des places réservées aux arrivants à hauteur de 10 % et corrélativement des sorties anticipées de condamnés.

M. Sueur a rappelé qu’elle avait été déposée le 5 sept. 2022 au Sénat par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Celle-ci pourrait être complétée avantageusement par voie d’amendement modifiant la loi du 8 avril 2021 afin de renforcer l’effectivité du recours préventif.

Plusieurs directions sont à explorer qui répondent à certaines critiques émanant du CGLPL et de la Commission nationale consultative des droits de l’homme et aux interrogations du Conseil des ministres du Conseil de l’Europe :

I – Tout d’abord, lorsqu’il a été constaté judiciairement dans une cellule une situation d’indignité liée à l’insuffisance d’espace vital et/ou occasionnée par des problèmes de vétusté et d’insalubrité, il doit être posé que, pour l’avenir, la cellule ne pourra être occupée que si la situation d’indignité y a définitivement cessé.

Cela devrait donc bénéficier aux autres occupants de ladite cellule et pour tout autre détenu qui y serait affecté ultérieurement.

II – Ensuite, lorsque le transfèrement du requérant dans un autre établissement a lieu, celui-ci doit mettre fin à la situation d’indignité.

Il faut donc que, pour l’avenir, le requérant soit garanti que cette situation ne se renouvellera pas dans le nouvel établissement où il est affecté, s’il s’agit d’une autre maison d’arrêt.

La question qui est posée est celle de la sanction d’une récidive d’indignité des conditions de détention.

Dans ce cas, le juge à nouveau saisi devrait pouvoir ordonner sa remise en liberté de plein droit selon le cas, sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence sous surveillance électronique ou bien dans le cadre d’une libération sous contrainte mais en prévoyant que celle-ci pourra être ordonnée quel que soit le quantum de peine déjà exécuté (art.720 CPP).

III – Enfin, la proposition de transfèrement que doit faire l’administration pénitentiaire en phase II dans un délai de 30 jours au détenu (art. R 249-27 CPP), devrait être soumise au juge saisi pour que celui-ci donne son avis sur le choix du nouvel établissement selon sa nature et sa localisation.

La mission d’information de l’Assemblée nationale qui porte sur les alternatives à la détention et l’éventuelle création d’un mécanisme de régulation carcérale dont le rapport sera déposé au mois de juillet prochain, pourrait également se saisir de toutes ces pistes d’améliorations du dispositif actuel.

Pour conclure, comme l’a souligné M. Quinquis, le Conseil des ministres du Conseil de l’Europe a demandé à la France de lui fournir un nouveau plan d’action d’ici à septembre prochain, lequel devra être accompagné d’un – « (…) maximum d’exemples juridictionnels concrets en précisant les délais en pratique de la procédure et les résultats obtenus » (§ 7).

Sans les différentes évolutions nécessaires que je viens d’évoquer avec vous, je crains que l’exercice ne se révèle particulièrement ardu…

Je vous signale, enfin, que plusieurs requêtes visant la France au sujet de la situation du centre pénitentiaire de Fresnes ont été communiquées au gouvernement et que la CEDH se trouve à nouveau saisie notamment de griefs relatifs à la violation du recours effectif. Si le gouvernement a proposé un règlement amiable aux requérants, certains d’entre eux n’ont pas accepté cette proposition et un nouvel arrêt devrait donc être rendu au cours de l’été.

A cet égard, une toute récente décision du président de la chambre de l’application des peines de la Cour d’appel de Paris relative à cet établissement qui a été rapportée au Dalloz Actualité, ne milite guère dans le sens de l’effectivité du recours préventif. 

Eric SENNA,

Président de chambre à la cour d’appel de Montpellier,

Chargé d’enseignement des universités d’Aix-Marseille et de Montpellier