Retour sur la jurisprudence constitutionnelle en matière d’IVG

Eric SALES.

Pays des droits de l’Homme, la France n’a pas été pionnière en ce qui concerne la reconnaissance et la protection de la liberté des femmes en matière d’avortement[1]. La Russie le légalise en 1920 tout comme la Roumanie en 1956[2] en le considérant comme « le principal moyen de contrôle de la fécondité face à un accès limité à la contraception moderne et à un manque d’éducation sexuelle »[3]. En revanche, la France fait partie des Etats qui ont régulièrement enregistré de nombreux progrès législatifs dans ce domaine depuis 1975[4] tout en refusant initialement d’en faire un moyen de régulation des naissances[5]. Récemment encore, le Parlement a recherché à renforcer le droit à l’avortement en portant, en 2022, le délai légal pour y recourir de 12 à 14 semaines[6]. Si l’interruption volontaire de grossesse (IVG) est « une question qui a toujours été très grave et qui revêt des aspects religieux, moral, économique et politique »[7], tout comme juridique, sa remise en cause n’est pas à l’ordre du jour en France. Il n’existe effectivement aucun signe permettant d’attester, comme ailleurs, de régressions légales ou de changements jurisprudentiels préjudiciables à la liberté des femmes. Par exemple, l’Espagne a rétabli, en 2015, l’obligation de recueillir le consentement pour les mineures souhaitant avorter[8]. En 2021, le Portugal a abandonné la gratuité des frais de santé relatifs à l’IVG et a rendu obligatoire un examen psychologique préalable pour les femmes concernées[9]. Si chacun a pu noter le revirement de jurisprudence de la Cour Suprême des Etats-Unis qui, avec l’arrêt Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization du 24 juin 2022[10], a jugé que le pouvoir d’autoriser l’avortement relevait désormais de la compétence des États fédérés[11], il convient de remarquer que les avortements « pour malformation grave et irréversible du fœtus ou pour maladie incurable qui menace la vie du fœtus » ont été interdits en Pologne après une décision du tribunal constitutionnel du 22 octobre 2020. Seules les IVG en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère restent autorisées[12] ce qui réduit de façon drastique le champ des possibles.

Toutefois, prenant acte de tels bouleversements intervenus à l’étranger[13] et se souvenant de la mise en garde de Simone de Beauvoir[14], le pouvoir constituant français a souhaité, par précaution, inscrire à l’article 34 de la Constitution que « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse »[15]. La France est ainsi devenue le premier pays consacrant cette liberté dans sa Constitution, actant d’une avancée historique remarquable et hautement symbolique alors que d’autres, comme en Hongrie en 2011, ont inscrit dans le champ constitutionnel le principe selon lequel « la vie humaine est protégée depuis la conception », ce qui peut être interprété comme une « mise hors la loi de l’interruption de grossesse »[16].

Cependant, en modifiant la Constitution du 4 octobre 1958 dans le sens précité, le pouvoir constituant dérivé n’a fait, en réalité, qu’entériner le droit existant depuis 1975. Depuis cette date déjà, le Parlement détermine, par la loi, les conditions d’exercice de l’avortement et ce sous le contrôle éventuel du Conseil constitutionnel[17]. Sur les onze lois votées en France, entre 1975 et 2022, concernant directement ou indirectement la question de l’avortement, le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de se prononcer sur sept d’entre elles[18]. Deux seulement ont fait l’objet d’une déclaration de non-conformité[19]. La loi ordinaire la plus récente – celle du 2 mars 2022 portant le délai légal pour avorter de 12 à 14 semaines – n’a pas été soumise au contrôle des juges constitutionnels[20]. Il ressort de cet ensemble législatif une nette progression dans la liberté d’avorter laquelle était initialement fortement encadrée par la loi de 1975 dont le libéralisme est finalement à relativiser. Mais il était sans doute bien délicat à l’époque de passer d’une interdiction pénalement sanctionnée à un immédiat régime de grande liberté. Désormais, il existe un nombre important de garanties légales entourant la liberté de la femme de recourir à une interruption volontaire de grossesse et la jurisprudence constitutionnelle a globalement accompagné favorablement les progrès législatifs intervenus en ce domaine. Ainsi, une loi qui déciderait de rétablir l’article 317 du code pénal dans sa version initiale serait nécessairement considérée comme inconstitutionnelle car elle porterait atteinte à la liberté de la femme découlant de l’article 2 de la Déclaration de 1789. Il en irait de même pour une législation qui souhaiterait rétablir la condition de détresse pour recourir valablement à une interruption volontaire de grossesse car elle priverait de garanties légales cette même liberté. Les mêmes considérations peuvent être avancées vis-à-vis d’une loi qui réduirait considérablement le délai dans lequel un avortement peut être réalisé. Les exemples pourraient ainsi être multipliés pour démontrer que le Parlement a finalement fourni aux juges constitutionnels de nombreux arguments permettant de protéger la liberté des femmes de toute tentative de régression. A ce sujet, le Conseil constitutionnel s’est montré ferme sur des questions de principe (I.) tout en étant plus réservé sur l’étendue de son contrôle (II.).

I. Un Conseil constitutionnel ferme sur des questions de principe

En 1975, la désignation par le Président Frey d’un rapporteur – M. Goguel – défavorable à l’IVG pouvait donner à croire à l’élaboration d’un rapport à charge contre la loi Veil. Il n’en fut rien. Si le rapporteur a évoqué longuement ses convictions personnelles – largement partagées par le Président du Conseil lequel s’est déclaré « très sensible » à ses propos[21] – il a conclu, d’abord et avant toute chose, à la conformité de la loi à la Constitution. Entre deux options le conduisant, pour l’une, à bloquer toute évolution législative favorable à la reconnaissance de l’interruption volontaire de grossesse au nom d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) (A) et, pour l’autre, à l’enraciner dans une liberté constitutionnelle reconnue à la femme (B), le Conseil constitutionnel a choisi, dès 1975[22], la voie la plus libérale.

A. La mise à l’écart d’un PFRLR opposable à l’IVG

Dans leur saisine d’une brieveté remarquable, les députés qui ont déféré à la censure du Conseil Constitutionnel la loi relative à l’interruption volontaire de la grossesse de 1975 lui demandaient notamment de dire que les dispositions de l’article 3 – en tant qu’il autorise l’avortement, sans autres conditions que de forme, durant les dix premières semaines de la grossesse – étaient non conformes aux principes réaffirmés par le préambule de la Constitution[23]. Si la faiblesse de l’argumentation juridique du moment tranche avec les saisines parlementaires ultérieures, encore fallait-il que le Conseil constitutionnel soit en mesure d’identifier lesdits principes.

Il l’a fait, avec la même sobriété que la lettre de saisine, en affirmant notamment « qu’aucune des dérogations prévues par cette loi n’est, en l’état, contraire à l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République »[24]. En la matière, le compte rendu de la séance du 14 janvier 1975 est particulièrement éclairant. Il permet effectivement de découvrir que le rapporteur de l’époque – M. Goguel – a soumis à l’appréciation de ses collègues la question de savoir si l’interdiction par la loi pénale de toute interruption volontaire de la grossesse pouvait être considérée comme un de ces principes fondamentaux reconnus par les lois de la République[25]. L’interrogation était fondamentale car une réponse favorable devait conduire le Conseil à la censure de la loi pour inconstitutionnalité et à l’interdiction constitutionnelle durable de l’interruption volontaire de grossesse. Le questionnement n’était, par ailleurs, pas dénué d’intérêt. En effet, il est vrai que la République a, pendant de longues années, interdit et pénalement sanctionné le recours à l’interruption volontaire de grossesse. Plus précisément, elle a conservé une prohibition antérieurement consacrée par une législation qu’il est possible de faire remonter à l’édit de 1556 et au code pénal de 1810. Dans le cadre de ce dernier, l’avortement était un crime jugé par une cour d’assises et passible d’une peine de réclusion. L’article 317 punissait effectivement d’une peine d’emprisonnement et d’une amende quiconque qui a procuré ou tenté de procurer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte, qu’elle y ait consenti ou non. Il aggravait les sanctions s’il était établi que le coupable s’était livré habituellement à de tels actes. Etait également punie, la femme qui avait bénéficié de l’avortement ou qui avait tenté de se le procurer ou encore qui avait consenti à faire usage des moyens à elle indiqués ou administrés à cet effet. Les membres du corps médical pouvaient également être pénalement sanctionnés et, le cas échéant, condamnés à une interdiction temporaire ou définitive de l’exercice de leur profession. Dans la continuité de cette réglementation, la loi du 1er août 1920[26] a également réprimé l’incitation à l’avortement et la loi du 21 mars 1923 a transformé l’avortement en délit[27] en ayant avant tout pour objectif de renforcer la répression car les jurys populaires apparaissaient trop souvent cléments dans les affaires d’avortement.

Toutefois, le rapporteur Goguel a considéré, dans un passage souligné du compte rendu, que « les principes fondamentaux visés par le préambule sont ceux des lois établies par la République »[28]. Pour lui, « la référence à ces principes doit certainement être utilisée avec réserve et seulement dans les cas où il apparaît avec évidence au Conseil constitutionnel qu’il s’agit de principes consubstantiels à la philosophie politique et sociale de la République »[29].

En ce sens, il a proposé, dans son projet de décision, un considérant qui n’a pas été repris par la suite. Il énonçait « que si la République a maintenu en vigueur une législation pénale datant de 1810 concernant l’avortement et l’a même modifiée en 1923 et 1939 dans l’intention de la rendre plus efficace, il ne s’ensuit pas nécessairement que cette législation ait pour autant correspondu à un principe fondamental reconnu par les lois de la République ».[30]

Ainsi, après avoir activé le préambule de la Constitution et protégé la liberté d’association en ayant recours à la catégorie bien indéterminée des PFRLR[31] tout en marquant profondément les esprits en matière de défense des droits et libertés fondamentaux, il était certainement mal venu pour le Conseil d’exploiter à nouveau les PFRLR afin d’ancrer une posture résolument conservatrice et défavorable à toute amélioration du sort des femmes face à l’avortement. En procédant différemment le Conseil aurait pris le risque de « bloquer complètement toutes les modifications législatives rendues nécessaires, selon l’appréciation des Chambres du Parlement dont c’est le rôle essentiel, par l’évolution sociale »[32].

B. Le rattachement de l’IVG à la liberté de la femme énoncée à l’article 2 de la DDHC

Depuis 1975, la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse dispose d’un fondement constitutionnel indiscutable. Elle est, en outre, confrontée à d’autres exigences constitutionnelles et conditionnée par la loi.

Au niveau des sources constitutionnelles, le Conseil constitutionnel a précisé clairement les choses en affirmant que la loi relative à l’interruption volontaire de la grossesse respecte la liberté des personnes appelées à recourir ou à participer à une interruption de grossesse. En conséquence, elle ne porte pas atteinte au principe de liberté posé à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen[33] rappelant que les droits naturels et imprescriptibles doivent être conservés par toute association politique. Cette base constitutionnelle est constante dans sa jurisprudence[34] et la liberté en question est facilement identifiable. Tout d’abord, elle repose sur la liberté de choix de la femme de se soumettre à une interruption de grossesse. Une législation qui ne permettrait plus l’avortement ou qui en ferait une obligation – imposées par d’autres dans des circonstances déterminées ou non[35] – ou encore qui le soumettrait à une autorisation préalable[36], serait certainement contraire à l’article 2 de la Déclaration de 1789.

La femme doit pouvoir également apprécier librement la situation dans laquelle elle se trouve. Sur ce point, la loi prévoit désormais que la femme enceinte qui ne veut pas poursuivre une grossesse peut en demander l’interruption à un médecin sans avoir à justifier d’une situation de détresse comme l’exigeait initialement la loi de 1975[37].

Cette liberté de choisir implique aussi sans doute que la décision soit éclairée. En ce sens, la loi a pu prévoir l’obligation d’information des médecins et celle de recourir à une consultation préalable à caractère social laquelle reste une possibilité pour les femmes majeures et un impératif pour les femmes mineures non émancipées[38]. Les informations relatives aux aides et secours dont peuvent bénéficier les mères et leurs enfants sont effectivement précieuses en la matière à condition qu’elles soient délivrées en toute objectivité sans orienter par avance la décision des patientes.

Cette liberté de choisir suppose, par ailleurs, que la femme ne soit pas entravée dans sa décision. A ce titre, les dispositions législatives répriment le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer une interruption volontaire de grossesse ou de s’informer sur une interruption volontaire de grossesse ou les actes préalables à celle-ci par tout moyen. Ce délit d’entrave est constitué dans deux cas : soit lorsque l’accès ou le fonctionnement des établissements pratiquant l’interruption de volontaire de grossesse est perturbé, soit lorsque des pressions morales et psychologiques, menaces ou actes d’intimidation sont exercés à l’encontre des personnes cherchant à s’informer sur une interruption volontaire de grossesse, des personnels travaillant dans ces établissements, des femmes venues recourir à une interruption volontaire de grossesse ou de leur entourage[39]. Sur ce sujet, le Conseil constitutionnel a considéré que le législateur a entendu prévenir des atteintes susceptibles d’être portées au droit de recourir à une interruption volontaire de grossesse dans les conditions prévues par le code de la santé publique. L’objet desdites dispositions est ainsi de garantir la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration de 1789[40].

En outre, la liberté de choix de la femme ne saurait impliquer une obligation faite à quiconque de concourir à une interruption de grossesse sans enfreindre la liberté et sans opprimer la conscience d’autrui. Ainsi, la clause de conscience permet aux membres du corps médical de refuser de pratiquer un avortement et d’y participer car la liberté de la femme d’y recourir ne peut être perçue comme autorisant le sacrifice d’autres droits et libertés. A ce titre, le code de la santé publique préserve de la façon la plus claire la liberté des médecins, sage-femmes, infirmiers, infirmières et auxiliaires médicaux, quels qu’ils soient, car leur conscience peut leur interdire de concourir à une interruption de grossesse[41].

Enfin, la liberté de la femme de décider d’avorter doit pouvoir être concrétisée dans des conditions de sécurité telles que la santé de la femme ne se trouve pas menacée. Ainsi, elle ne peut être pratiquée que par un médecin dans un établissement d’hospitalisation public ou privé[42]. Lorsque le Parlement a prévu d’allonger de dix à douze semaines le délai pendant lequel une interruption volontaire de grossesse peut être réalisée, le Conseil a reconnu que si l’avortement constitue un acte médical plus délicat lorsqu’il intervient entre la dixième et la douzième semaine, il peut être pratiqué, en l’état actuel des connaissances et des techniques médicales, dans des conditions de sécurité telles que la santé de la femme ne se trouve pas menacée[43]. Le lien entre la liberté de la femme et la santé est également présent dans le cadre d’une IVG pour motif thérapeutique. Depuis 1975, celle-ci peut être pratiquée à tout moment si deux médecins attestent, après examen et discussion, que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ou lorsqu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

La liberté de la femme de décider d’une IVG n’est toutefois pas absolue et elle ne constitue qu’une exception apportée au principe du respect de tout être humain dès le commencement de la vie mentionné dans l’article 1er de la loi de 1975. A l’époque, le Conseil a bien pris le soin de souligner qu’il n’admettait qu’il soit porté atteinte audit principe qu’en cas de nécessité et selon les conditions et limitations définies par la loi[44]. Ecartant le contrôle de conventionnalité de la loi pour des raisons parfaitement connues sur lesquelles il n’est pas utile ici de revenir et donc l’argument selon lequel la loi portait atteinte au droit à la vie, les juges constitutionnels étaient partagés sur la délicate question du début de la vie. Alors que certains estimaient qu’elle commençait dès la conception, d’autres, au contraire, retenaient la naissance pour point de départ. Le conseiller rapporteur insistait pour sa part sur des arguments juridiques[45] en considérant « (qu’)aucun des textes constitutionnels adoptés ne comporte d’allusion à la protection de la vie de l’enfant avant sa naissance, et le Préambule de 1946 doit donc être interprété à la lumière de la Déclaration de 1789 qu’il réaffirme, comme concernant les enfants nés, et non les enfants à naître ». Pour Goguel, « la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, de la façon la plus claire et la plus évidente, exprime l’idée que c’est au moment de sa naissance que l’être humain devient sujet de droit : Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. Or le Préambule de 1946 comme celui de 1958 réaffirment et proclament l’un et l’autre les Droits de l’Homme consacrés et définis par la Déclaration de 1789. c’est donc en fonction de celle-ci, (…) que, sauf formulation plus extensive, doivent être interprétés les termes « (d’)être humain »,  » (d’)enfant » et « (d’)individu » qui figurent dans le Préambule de 1946 »[46]. Il termine son raisonnement en disant la certitude qui est la sienne selon laquelle « la loi relative à l’interruption volontaire de la grossesse ne peut pas être déclarée non conforme à la Constitution, motif pris de ce qu’elle serait contraire au principe de protection de l’être humain dès la conception qu’on peut déduire de la rédaction donnée aux articles 725 et 906 du Code civil en matière successorale »[47]. Sur ce sujet, le désaccord avec le Président du Conseil était important. Il estimait, en effet, qu’il « serait dangereux … d’affirmer, comme le propose le rapporteur, que l’être humain n’est protégé qu’à partir de sa naissance »[48]. Sur ce point, il était rejoint par P. Coste-Floret qui soulignait, en citant le répertoire Dalloz de droit pénal, que « l’idée fondamentale du respect de la vie humaine a inspiré un ensemble de dispositions législatives tendant à protéger pénalement celle-ci avant même la naissance »[49].

Quoi qu’il en soit, le Conseil ne se prononcera pas directement sur ce sujet dans sa décision de 1975 et il ne retiendra pas l’existence d’un principe constitutionnel du droit à la vie de l’être humain dès sa conception[50]. En revanche, en 2001, au moment de l’allongement du délai pendant lequel peut être pratiquée une interruption volontaire de grossesse, le Conseil constitutionnel mettra en balance la liberté de la femme avec le principe constitutionnel de dignité de la personne humaine. Il retiendra ainsi qu’en portant de dix à douze semaines le délai pendant lequel peut être pratiquée une interruption volontaire de grossesse, la loi n’a pas, en l’état des connaissances et des techniques, rompu l’équilibre que le respect de la Constitution impose entre, d’une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et, d’autre part, la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La référence à la dignité est ici réalisée en liaison avec l’article 16-4 du code civil qui identifie comme pratique eugénique « toute pratique … tendant à l’organisation de la sélection des personnes » et le Conseil estime que tel n’est pas le cas en l’espèce car en réservant la faculté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse à « la femme enceinte que son état place dans une situation de détresse », le législateur a entendu exclure toute fraude à la loi et, plus généralement, toute dénaturation des principes qu’il a posés, principes au nombre desquels figure, à l’article L. 2211-1 du code de la santé publique, « le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie »[51].

Pour terminer le propos, il convient de remarquer que la compétence du Parlement pour légiférer en matière d’avortement a, sous la Vème République, toujours été reconnue sur le fondement de l’article 34 de la Constitution. Ainsi, la formule retenue par la révision constitutionnelle de 2024[52], selon laquelle « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse », ne change pas fondamentalement l’état du droit existant. A l’origine, le Parlement est intervenu, en 1975, pour dépénaliser l’avortement. Il l’a fait car le domaine constitutionnel réservé à la loi prévoit qu’elle fixe les règles concernant la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables. Ainsi, lorsque le législateur intervient en 1975, c’est pour faire en sorte que l’interruption de grossesse ne soit plus considérée comme un délit et pour autoriser les femmes à y recourir dans les conditions légalement définies. Notons tout de même que l’article 317 du code pénal a simplement fait l’objet d’une suspension temporaire pendant cinq ans, laquelle sera définitivement levée en 1979[53]. La Parlement s’était donc réservé la possibilité de rétablir l’article 317 du code pénal en fonction de l’observation de la pratique dans les interruptions volontaires de grossesse[54]. En conséquence, l’article 34 de la Constitution a toujours été la double porte d’entrée par laquelle le Parlement a fait sortir l’avortement du champ du code pénal en le faisant pénétrer dans le code de la santé publique car il appartient aussi à la loi d’établir les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Depuis 1975, la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse, liberté rattachée par le Conseil constitutionnel à l’article 2 de la déclaration de 1789. Il appartient donc au Parlement de la mettre en œuvre sans la remettre en cause ce qui dépend étroitement du contrôle de constitutionnalité réalisé par le Conseil constitutionnel.

II. Un Conseil constitutionnel réservé sur l’étendue de son contrôle

Le contrôle de constitutionnalité des lois relatives à l’interruption volontaire de grossesse révèle une réserve initiale du Conseil constitutionnel l’amenant à dissocier, dès 1975, son pouvoir d’appréciation de celui du Parlement (A). Par la suite, il accompagnera favorablement chaque évolution législative intervenue en la matière (B).

A. Un Conseil constitutionnel rappelant le pouvoir général d’appréciation et de décision du Parlement

En 1975, le Conseil constitutionnel inaugure une formule en observation de laquelle il affirme que l’article 61 de la Constitution ne lui confère pas « un pouvoir général d’appréciation et de décision identique à celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois déférées à son examen »[55].

Parfaitement connue des constitutionnalistes[56], la petite phrase apparaît au tout début de la décision du 15 janvier 1975 dans le premier considérant avant même l’identification d’une quelconque norme de référence propre au contentieux constitutionnel. Signe de déférence à l’endroit du Parlement ou simple distinction des rôles institutionnels ou encore illusion donnant à croire à une autolimitation du Conseil, la formule peut donner lieu à de nombreuses interprétations. Le compte rendu accompagnant la décision précitée s’avère particulièrement intéressant en ce domaine. Tout d’abord, dans ses propos le rapporteur Goguel – faisant état de sa lecture « attentive et complète » des débats et rapports parlementaires ayant étudié le problème de l’interruption volontaire de grossesse – rend hommage aux parlementaires « qui, en votant la loi (…) ont rempli le mandat d’exercice de la souveraineté nationale qui est le leur, d’abord parce (…) qu’ils le méritent, ensuite parce que (l’)examen de la loi doit tenir compte des conditions satisfaisantes dans lesquelles cette loi a été discutée par ceux qui en avaient la responsabilité et qui ont assumé cette responsabilité dans des conditions fort honorables à la fois pour eux et pour nos institutions »[57]. Il loue donc le sérieux, la conscience et le scrupule des parlementaires ayant abordé la question qui leur était soumise et ce dans le respect des points de vue différents des leurs[58].

Ensuite, une fois la déférence, la révérence et la courtoisie affichées, le rapporteur souligne que l’examen de la loi ne saurait être circonscrit aux textes invoqués par les saisissants. Il appartient effectivement au Conseil de se prononcer sur la totalité de la loi[59]. Si « les responsabilités du Conseil constitutionnel ne se confondent pas avec celles du législateur »[60], comme le précise le président du moment, il lui appartient d’exercer un contrôle de l’intégralité de la loi. En d’autres termes, si le Parlement traduit une politique déterminée dans la loi en exerçant la souveraineté nationale, le Conseil, de son côté, accomplit sa mission de contrôle la loi par rapport à la Constitution en se limitant à dire le droit[61]. Pour ce faire, le Conseil doit circonscrire son examen à la vérification du respect des règles constitutionnelles de procédure et des normes définies par les textes constitutionnels à savoir la Déclaration de 1789, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, les préambules de la Constitution de 1946 et de 1958 ainsi que la Constitution du 4 octobre 1958[62]. En 1975, le rapporteur invitera les membres du Conseil à reconnaître la conformité à la Constitution de la loi relative à l’IVG car elle respecte la liberté énoncée à l’article 2 de la Déclaration de 1789.

Toutefois, l’exercice n’est pas des plus faciles et particulièrement en ce qui concerne l’interruption volontaire de la grossesse car il s’agit d’un problème complexe comportant « des données aussi diverses d’ordre moral, métaphysique, social et juridique »[63]. Le rapporteur Goguel en convient en faisant remarquer que les considérations juridiques doivent l’emporter sur les autres même s’il est difficile d’en faire abstraction[64]. En ce sens, il termine la présentation de son rapport en faisant état de remarques d’ordre personnel. A ce titre, il avoue ne pas être favorable à l’avortement et être hostile, en ce qui concerne sa famille, à l’utilisation de la liberté d’avorter instituée par la loi pour deux raisons essentielles. D’abord, sur le plan social, car « l’un des traits les plus inquiétants de notre époque consiste dans la généralisation de la tendance à refuser d’assumer la responsabilité des actes qu’on a accomplis »[65]. Ensuite, pour des raisons qui tiennent à ses convictions religieuses chrétiennes, car il est pour lui « douloureux de penser que la législation française va permettre, pour des raisons de simple convenance de rejeter (…) l’espérance liée à l’attente et à la naissance d’un petit enfant ». De son côté, le Président du Conseil s’est déclaré « très sensible » aux réflexions personnelles développées par M. Goguel sur le sujet[66] et les conseillers Coste-Floret, Brouillet, Chatenet et Rey estimaient que l’avortement était contraire à la Constitution car attentatoire au droit à la vie. Au final, si le Conseil a reconnu la constitutionnalité de la loi, il l’a fait en exprimant plus la résignation de la plupart de ses membres[67] face au choix politique du Parlement, permettant d’éviter les nombreux drames humains survenus lors de pratiques illicites de l’avortement, qu’en mettant en évidence leur conviction de contribuer à une avancée libérale historique en faveur des droits des femmes.

Un exemple principal en atteste sur le terrain du silence observé par le Conseil constitutionnel en ce qui concerne une disposition centrale de la loi. Si l’article 1er de la loi du 17 janvier 1975 affirme que la loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie, en ajoutant qu’il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu’en cas de nécessité et selon les conditions définies par la présente loi, l’article 4 précise que la femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l’interruption de sa grossesse avant la fin de la dixième semaine. Ce dernier point est crucial car il s’agit de l’exception au principe susvisé et qu’elle conditionne l’application de la loi et donc la possibilité de recourir à un avortement. Or, dans sa décision le Conseil ne s’est pas exprimé sur la question sensible de la « situation de détresse » laissée sans précision par le législateur. Doit-elle être appréciée par la femme concernée et par elle seule ? Doit-elle l’être par le médecin consulté ? Doit-elle l’être à l’occasion de la consultation sociale obligatoire ? Doit-elle l’être par les juges ordinaires en cas de conflit entre la patiente et les personnes consultées ? L’absence d’indication de la part du législateur aurait pu être soulignée par le Conseil et discutée sur le terrain de l’incompétence négative du Parlement[68]. Elle aurait pu faire au moins l’objet d’une réserve d’interprétation[69] tant cet angle mort législatif était à lui seul préjudiciable aux femmes qui souhaitent volontairement interrompre leur grossesse. En effet, si la situation de détresse est considérée comme non remplie, l’avortement devient tout simplement impossible. En conséquence, le double silence du Parlement et du Conseil sur cette disposition phare de la loi pouvait réduire à néant la liberté constitutionnelle de la femme de recourir à une IVG. Si le Conseil constitutionnel n’a pas jugé utile de prendre position sur ce sujet essentiel dans sa décision, il ne s’agit pas pour autant d’un acte manqué. En effet, dans le compte-rendu des débats, le conseiller Chatenet soulignait sans détour l’importance de « savoir comment sera interprétée la loi par ceux qui auront à l’appliquer car les mots de nécessité et de détresse sont très vagues et il ne faut pas avoir l’air d’en être dupe »[70].

Toutefois, le rapporteur Goguel coupera court à la discussion en considérant que « personne ne pourrait apprécier si une femme qui a recours à une interruption de grossesse se trouve dans un cas de nécessité ou une situation de détresse et qu’il est donc préférable de ne pas faire état de ces réserves dans la décision »[71]. Le Conseil sera cependant beaucoup plus explicite sur ce sujet primordial lors de l’examen de la constitutionnalité de loi du 4 août 2014 remplaçant les mots « que son état place dans une situation de détresse » par les mots « qui ne veut pas poursuivre une grossesse ». Il estime alors que la loi du 17 janvier 1975 a autorisé une femme à demander l’interruption volontaire de sa grossesse lorsque « son état » la « place dans une situation de détresse » et que ces dispositions réservaient à la femme le soin d’apprécier seule si elle se trouvait dans cette situation. En conséquence, cette modification ne méconnaît aucune exigence constitutionnelle[72]. Le contexte de 2014 n’était pas celui de 1975 et le Conseil se montre plus directement favorable aux évolutions législatives intervenant en matière d’IVG.

B. Un Conseil constitutionnel accompagnant favorablement les évolutions législatives en matière d’IVG

Dans le cadre des décisions de conformité rendues sur le sujet le Conseil constitutionnel a pris acte d’importantes évolutions positives décidées par le Parlement en matière d’avortement. Tout d’abord, lorsque la loi a porté de dix à douze semaines de grossesse le délai pendant lequel peut être pratiquée une interruption volontaire de grossesse, quand  la femme enceinte se trouve du fait de son état dans une situation de détresse, le Conseil a considéré que la loi n’avait pas, en l’état des connaissances et des techniques, rompu l’équilibre que le respect de la Constitution impose entre, d’une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et, d’autre part, la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Si  l’interruption volontaire de grossesse constitue un acte médical plus délicat lorsqu’elle intervient entre la dixième et la douzième semaine, le juge constitutionnel estime qu’elle peut être pratiquée, en l’état actuel des connaissances et des techniques médicales, dans des conditions de sécurité telles que la santé de la femme ne se trouve pas menacée[73]. Il aurait pu retenir une position inverse en actant d’une atteinte « au principe du respect de tout être humain dès le commencement de sa vie » dès lors que la loi autorise l’interruption du développement « d’un être humain ayant accédé au stade du fœtus », lequel « constitue une personne humaine en puissance » et jouirait « d’une protection juridique renforcée »[74].

Ensuite, il a accepté que le législateur donne une rédaction nouvelle au déroulement de la première visite médicale sollicitée par une femme en vue de l’interruption de sa grossesse et prévoit, en en précisant le contenu, qu’un « dossier-guide » lui est remis à cette occasion . Le fait que la loi n’impose plus que figure dans ce dossier « l’énumération des droits, aides et avantages garantis par la loi aux familles, aux mères, célibataires ou non, et à leurs enfants, ainsi que des possibilités offertes par l’adoption d’un enfant à naître » n’a pas été jugé de nature à porter atteinte au principe de liberté posé à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen car les informations relatives aux aides et secours dont peuvent bénéficier les mères et leurs enfants sont dispensées aux femmes majeures qui ont accepté la consultation préalable à caractère social et car cette consultation « est systématiquement proposée avant … l’interruption volontaire de grossesse, à la femme majeure » et « comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l’intéressée lui sont apportés ». Il en est allé de même concernant la disposition prévoyant que cette consultation demeure uniquement obligatoire pour les femmes mineures non émancipées[75]. Or, il aurait pu juger que les modifications ainsi apportées au code de la santé publique remettaient en cause le niveau des garanties légales qui étaient auparavant en vigueur pour assurer la sauvegarde de la liberté individuelle de la mère et n’assuraient plus que la femme enceinte donnera un consentement libre et éclairé, inhérent à l’exercice de la liberté de ne pas avorter[76].

Lorsque le Parlement a retiré au chef de service d’un établissement public de santé la faculté de s’opposer à ce que des interruptions volontaires de grossesse soient effectuées dans son service, le Conseil a considéré qu’il conservait, en application des dispositions du code de la santé publique, le droit de ne pas en pratiquer lui-même. Ainsi était sauvegardée sa liberté, laquelle relève de sa conscience personnelle et ne saurait s’exercer aux dépens de celle des autres médecins et membres du personnel hospitalier qui travaillent dans son service[77]. Par ailleurs,comme cela a déjà été mentionné, le Conseil a jugé que la suppression légale de l’exigence de détresse de la femme enceinte était en adéquation avec les exigences constitutionnelles car il a estimé que, sous l’empire de la loi de 1975, cette condition devait déjà être appréciée seulement par la femme concernée, ce qui était loin d’être évident[78]. Enfin, s’agissant de la loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, les juges constitutionnels ont retenu que le législateur a entendu prévenir des atteintes susceptibles d’être portées au droit de recourir à une interruption volontaire de grossesse en formulant deux réserves d’interprétation[79]. L’objet des dispositions contestées était ainsi de garantir la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration de 1789.

Jusqu’à présent, les seules censures prononcées par le Conseil constitutionnel ont porté sur la méconnaissance de l’article 37-1 de la Constitution[80] concernant les dispositions à caractère expérimental et des questions de procédure tenant à l’exercice du droit d’amendement. Dans le premier cas, la loi du 16 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, prévoyait « (qu’) une expérimentation est menée dans une région connaissant un taux important de recours à l’interruption volontaire de grossesse tendant à autoriser les pharmaciens d’officine ayant reçu une formation spécifique à délivrer, pour trois mois et sans renouvellement possible, une contraception œstroprogestative aux femmes de plus de quinze ans et de moins de trente-cinq ans, dans des conditions définies par voie réglementaire ». Une autre expérimentation était également prévue afin de permettre, toujours dans une région connaissant un taux important de recours à l’interruption volontaire de grossesse, la possibilité d’étendre – après consultation des professionnels concernés – aux sages-femmes la pratique des interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse. Après avoir rappelé l’article 37-1 de la Constitution, les juges constitutionnel ont précisé que sur le fondement de cette disposition, le Parlement peut autoriser, dans la perspective de leur éventuelle généralisation, des expérimentations dérogeant, pour un objet et une durée limités, au principe d’égalité devant la loi. Toutefois, il doit en définir de façon suffisamment précise l’objet et les conditions et ne pas méconnaître les autres exigences de valeur constitutionnelle. En l’espèce, les deux dispositions ont été déclarées contraires à la Constitution car le législateur a autorisé lesdites expérimentations sans en fixer la durée ce qui revenait à déléguer la fixation de celle-ci au pouvoir réglementaire[81].

Dans le second cas, un amendement à une proposition de loi, modifiant le code de la santé publique, permettait aux sages-femmes, à titre expérimental, de pratiquer l’interruption volontaire de grossesse par voie médicamenteuse et autorisait les infirmiers à délivrer et administrer des médicaments ayant pour but la contraception d’urgence dans les services de médecine de prévention universitaires et interuniversitaires. Toutefois, le Conseil a estimé que ces dispositions, qui ne présentent pas de lien avec les dispositions de la proposition de loi initiale, ont été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution[82]. Désormais, la possibilité pour les sages-femmes de procéder aux IVG par voie médicamenteuse[83] ou instrumentales[84] est prévue de façon généralisée par la loi.

Avant la révision constitutionnelle du 8 mars 2024, pour remettre en cause la liberté de la femme de recourir à une IVG, rattachée par le Conseil constitutionnel à l’article 2 de la Déclaration de 1789, il fallait la conjonction de circonstances particulières. Dans le premier cas, le vote d’une loi régressive et une absence de saisine, a priori et a posteriori, du Conseil constitutionnel étaient nécessaires. Dans le deuxième cas, il était impératif de cumuler le vote d’une loi rétrograde et une décision du Conseil, rendue dans le contentieux DC ou QPC, par laquelle les juges de la loi se seraient abrités derrière le pouvoir d’appréciation et de décision du Parlement en considérant – au travers d’une lecture bien douteuse des garanties légales – que celui-ci n’a pas porté atteinte à la liberté précitée. Dans le troisième cas, une loi progressiste pouvait être censurée par le Conseil au nom d’exigences constitutionnelles nouvelles ou reformulées. Fort heureusement, rien de tout cela ne s’est produit. A la suite du changement constitutionnel récent, il convient d’observer que ces trois éventualités demeurent. Tout dépendra donc, comme avant, de l’interprétation légale et jurisprudentielle qui sera donnée des conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. Il reste à espérer que législateur et juges constitutionnels poursuivront ensemble leur oeuvre collective en ayant le souci permanent de faire encore et toujours progresser les droits et libertés et celles et ceux des femmes en particulier.

Eric SALES,

Maître de conférences de droit public, HDR, Université de Montpellier, CERCOP


[1] Pour une étude complète sur le sujet, v. Agnès Guillaume, Clémentine Rossier, « L’avortement dans le monde. État des lieux des législations, mesures, tendances et conséquences », in Population 2018/2 (Vol. 73), p. 225 à 322.

[2] Ibid, p. 56.

[3] Ibid.

[4] V. Loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de la grossesse, JO, Lois et décrets (version papier numérisée) n° 0015 du 18/01/1975, p. 739.

[5] V. L’article 13 de la loi du 17 janvier 1975, abrogé par l’ordonnance  n° 2000-548 du 15 juin 2000, art. 4 II, JO du 22 juin 2000, p. 9340.

[6] V. La loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l’avortement, JO n°0052 du 3 mars 2022, Texte n° 1.

[7] V. les remarques du conseiller Dubois dans le compte rendu de la séance du Conseil constitutionnel du 14 janvier 1975, https://www.conseil-constitutionnel.fr/node/24183, p. 33.

[8] Obligation supprimée en 2018.

[9] L’avortement est légal depuis 2007.

[10] Cour suprême américaine, Dobbs, State Health officer of the Mississippi Department of Health, et al. c. Jackson Women’s Health Organization et al., 597 U. S. ____ (2022), 24 juin 2022, p.79.

[11] La Cour revient ainsi sur l’arrêt Roe v. Wade du 22 janvier 1973 par lequel elle avait considéré l’IVG comme un droit garanti au niveau fédéral. V. Cour suprême américaine, Roe c. Wade, 410 U.S. 113 (1973).

[12] V. Jakub Iwaniuk, « En Pologne, l’avortement devient quasiment illégal après une décision de justice », Le Monde du 22 octobre 2020.

[13] Pour une étude globale sur le sujet, v. Rapport n° 2070 de la commission des lois sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (n°1983). (M. Guillaume Gouffier Valente), https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/cion_lois/l16b2070_rapport-fond

[14] « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant », v. Rapport n° 2070 de la commission des lois sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse, préc.

[15] Loi constitutionnelle n° 2024-200 du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse, JO, n°0058 du 9 mars 2024, Texte n° 1.

[16] Maurin Picard, « La Hongrie adopte une Constitution très controversée », Le Figaro du 18 avril 2011.

[17] V. Maxime Charité, « Le conseil constitutionnel et l’interruption volontaire de grossesse », in Droit, Santé et Société 2024/1 (n° 5), p. 31 à 36.

[18] V. CC, Décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, JO du 16 janvier 1975, p. 671 ; CC, Décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, JO du 29 juillet 1994, p. 11024, cons. 12 à 14 ; CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, JO du 7 juillet 2001, p. 10828 ; CC, Décision n° 2009-584 DC du 16 juillet 2009, JO du 22 juillet 2009, p. 12244, texte n° 2. ; CC, Décision n° 2011-640 DC du 4 août 2011, JO du 11 août 2011 p. 13787, texte n° 8. ; CC, Décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, JO du 5 août 2014 p. 12966, texte n° 6 ; CC, Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, JO n°0068 du 21 mars 2017 texte n° 4.

[19] CC, Décision n° 2009-584 DC du 16 juillet 2009, préc. ; CC, Décision n° 2011-640 DC du 4 août 2011, préc.

[20] V. La loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l’avortement, préc. Tel a également été le cas de la loi du 31 décembre 1979  reconduisant la loi de 1975 sans limite de temps (Loi n° 79-1204 du 31 décembre 1979 relative à l’interruption volontaire de la grossesse, JO du 1 janvier 1980). Si la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 (JO n° 0294 du 18 décembre 2012) a bien fait l’objet d’une décision du Conseil, ce dernier n’a pas été saisi de la disposition législative décidant du remboursement à 100 % de l’IVG par l’assurance maladie.

[21] V. le compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, https://www.conseil-constitutionnel.fr/node/24183, p. 18 et s.

[22] Conseil constitutionnel, Décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, préc., p. 671.

[23] Ils concluaient également en soulignant que lesdites dispositions étaient non conformes aux dispositions de l’article 2 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales dont l’autorité est supérieure à celle des lois aux termes de l’article 55 de la Constitution. V. la lettre de saisine par 60 députés, https://www.conseil-constitutionnel.fr/les-decisions/decision-n-74-54-dc-du-15-janvier-1975-saisine-par-60-deputes. Pour information, il convient d’observer que ladite saisine a été accompagnée d’un mémoire produit par l’un des députés signataires, Jean FOYER, complété par deux autres notes du même auteur.

[24] Il rajoute que le principe énoncé dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, selon lequel la nation garantit à l’enfant la protection de la santé n’est pas méconnu et qu’il en va de même des autres dispositions ayant valeur constitutionnelle édictées par le même texte. V. le cons. 10 de la décision précitée du 15 janvier 1975.

[25] V. le compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 10. Le mémoire de Jean Foyer faisait état d’une méconnaissance de l’alinéa 10 du préambule de la Constitution de 1946 en vertu duquel « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».

[26] V. La loi du 1er août 1920 réprimant la provocation à l’avortement et à la propagande anticonceptionnelle, JO n° 0208 du 01/08/1920, p. 10934 et s.

[27] V. la loi du 21 mars 1923. Par la suite, sous le régime de Vichy, la loi du 15 février 1942 fait de l’avortement un crime d’Etat passible de la peine de mort.

[28] V. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 10. Pour un avis contraire, voir l’intervention de Coste-Floret lequel estime qu’il faut ranger dans les PFRLR « les principes antérieurs que la République a fait sienne ». Et, toujours selon Coste-Floret, parmi eux figure le droit à la vie dont le principe fondamental est exprimé aux articles 725 et 906 du code civil, principe que le Parlement a méconnu avec cette loi (p. 29). Il est rejoint sur ce point par le conseiller Brouillet (p. 30).

[29] V. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 10.

[30] Ibid, p. 41.

[31] CC, Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, JO du 18 juillet 1971, p. 7114.

[32] V. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 10.

[33] Article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression ».

[34] V. CC, Décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, JO du 16 janvier 1975, p. 671, cons. 8. V. également, CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, JO du 7 juillet 2001, p. 10828, cons. 5 ; CC, Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, Loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, JO n°0068 du 21 mars 2017 texte n° 4, cons. 10.

[35] Dans le même sens, v. V. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 15.

[36] Il faut sans doute réserver le cas, prévu par la loi, de la femme mineure célibataire pour qui le consentement de l’une des personnes qui exerce l’autorité parentale est requis depuis 1975. Toutefois, les femmes mineures seront autorisées à recourir à un avortement sans le consentement d’un adulte en 2001 à partir du moment où elles souhaitent garder le secret. Sur ce dernier point voir la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, JO n°0156 du 7 juillet 2001, Texte n° 1, article 7.

[37] CC, Décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, Loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, JO du 5 août 2014 p. 12966, texte n° 6, cons. 4.

[38] V. la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, JO n° 0156 du 7 juillet 2001, Texte n° 1. V. CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, préc., cons. 7.

[39] CC, Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, Loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, JO n°0068 du 21 mars 2017 texte n° 4, cons. 6.

[40] CC, Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, préc., cons. 10.

[41] Dans le même sens, v. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 15. Sur la clause de conscience, v. notamment Tatiana Gründler, « La clause de conscience en matière d’IVG, un antidote contre la trahison ? », Droit et cultures [En ligne], 74 | 2017-2, mis en ligne le 11 septembre 2017, consulté le 10 août 2024, http://journals.openedition.org/droitcultures/4329.

[42] La loi de 1975 prévoit que ces derniers établissements peuvent refuser. Toutefois si l’établissement a demandé à participer au service public hospitalier ou a conclu un contrat de concession, le refus n’est opposable que si d’autres établissements peuvent répondre aux besoins locaux.

[43] CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, préc., cons. 7.

[44] V. CC, Décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, préc., cons. 9. Certains conseillers ont fait connaître leur irritation vis-à-vis de l’hypocrisie du Parlement consistant à proclamer un principe en y apportant immédiatement des dérogations. V. le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 16, 31 et 33.

[45] Le rapporteur insiste sur ce point en précisant que « Nous ne sommes ni des biologistes ni des métaphysiciens, nous devons essayer d’être des juristes, c’est-à-dire d’interpréter les expressions contenues dans les textes que nous avons à appliquer à la lumière de leur contexte ». V. le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 12.

[46] V. les propos de Goguel dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 11 et s.

[47] Ibid, p. 14.

[48] V. les propos du président Frey dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 34.

[49] V. les propos de Coste-Floret dans le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 35.

[50] La rapporteur Goguel indiquait que seul l’article 23 du projet de Constitution du 19 avril 1946, qui n’est jamais entré dans notre droit positif, mentionnait la protection de la santé dès la conception. V. le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 12.

[51] CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, préc., cons. 5.

[52] Loi constitutionnelle n° 2024-200 du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse, préc.

[53] Loi n° 79-1204 du 31 décembre 1979, JO n° 0001 du 1er janvier 1980, p. 3.

[54] Selon M. Monnerville, « c’est la première fois qu’en matière pénale une loi est votée à l’essai ». V. le compte rendu précité de la séance du 14 janvier 1975, p. 32.

[55] Conseil constitutionnel, Décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, préc., cons. 1.

[56] Sur ce sujet v. notamment, Manon Altwegg-Boussac, « La « nature » de l’« appréciation du Parlement » selon le Conseil constitutionnel : la société, la science, et cetera », La Revue des droits de l’homme [En ligne], 20 | 2021, mis en ligne le 13 octobre 2021, consulté le 12 août 2024, http://journals.openedition.org/revdh/12773 ; Mélissandre Talon, « Le Conseil constitutionnel ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement : un mythe du droit constitutionnel », RDP, 2020, n°1 – page 137 et s.

[57] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 2.

[58] Ibid, p. 1 et 2. M. Chatenet soulignera de la même façon l’existence d’un « bon débat parlementaire », compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 31.

[59] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 3.

[60] V. les propos du président Frey, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 20.

[61] Notons au passage que cet avis n’est pas partagé par tous les membres du Conseil. M. Chatenet fait remarquer que « le Conseil n’est pas une institution judiciaire… Il examine la conformité d’un acte politique : la loi à un texte politique : la Constitution. Il doit donc se rapprocher le plus possible de l’impératoria brevitas », compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 38. Dans le même sens, voir les propos du conseiller Dubois selon lesquels « le Conseil constitutionnel n’est pas une juridiction », p. 46.

[62] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 14. Le rapporteur précise en ce qui concerne le texte de la Constitution du 4 octobre 1958 qu’il faut se concentrer sur les dispositions de principe figurant notamment aux articles 2, 3, 4, 5 et 66.

[63] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 1.

[64] Ibid.

[65] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 18 et s.

[66] V. les propos du président Frey, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 18 et s.

[67] Le président Frey ne souhaitait pas que, dans sa décision le Conseil se lie pour l’avenir et préférait « qu’il garde toute sa latitude d’appréciation si, par exemple, intervenait une loi autorisant l’avortement à huit mois et demi ou rendant obligatoire l’avortement thérapeutique », compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 38.

[68] Les premières décisions identifiées en ce domaine remontent à la fin de l’année 1960 et au début de l’année 1970. V. notamment, CC, n° 67-31, Décision du 26 janvier 1967, JO du 19 février 1967, p. 1793, cons. 4 et CC, n° 71-46, Décision du 20 janvier 1972, JO du 25 janvier 1972, p. 1036, cons. 3. Sur cette jurisprudence, v. Georges Schmitter, « L’incompétence négative du législateur et des autorités administratives », AIJC, 1991, 5-1989, pp. 137-176 ; Sur l’actualité de cette même jurisprudence, v. notamment Patricia Rrapi, « L’incompétence négative dans la QPC, de la double négation à la double incompréhension », Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, N° 34, janvier 2012 ; Ariane Vidal-Naquet, « L’état de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur l’incompétence négative », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2015/1, (N° 46), p. 5 à 19.

[69] Le premier cas concernant cette jurisprudence a été identifié dès 1959 dans la décidion du Conseil constitutionnel n° 59-2,  des 17, 18 et 24 juin 1959, JO du 3 juillet 1959, p. 6642, article 2. En ce sens, v. l’article préc. De Georges Schmitter, « L’incompétence négative du législateur et des autorités administratives ».

[70] V. les propos de Chatenet, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 47. Le conseiller réitère ici sa mise en garde car il a déjà indiqué que cette imprécision « risque d’être à l’origine des plus grandes difficultés dans l’application de la loi », p. 31.

[71] V. les propos de Goguel, compte rendu de la séance du 14 janvier 1975, préc., p. 47.

[72] CC, Décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, JO n°0179 du 5 août 2014, p. 12966, texte n° 6.

[73] CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, cons. 5 et 7.

[74] Sur ces différents points, v. les arguments développés dans la saisine du Conseil constitutionnel, CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, préc., cons. 3.

[75] CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, préc, cons. 10.

[76] Sur ces différents points, v. les arguments développés dans la saisine du Conseil constitutionnel, CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, préc., cons. 9.

[77] CC, Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, préc,. cons. 15.

[78] CC, Décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, JO n°0179 du 5 août 2014, p. 12966, texte n° 6.

[79] Selon la première, la seule diffusion d’informations à destination d’un public indéterminé sur tout support, notamment sur un site de communication au public en ligne, ne saurait être regardée comme constitutive de pressions, menaces ou actes d’intimidation au sens des dispositions contestées, sauf à méconnaître la liberté d’expression et de communication. Ces dispositions ne peuvent donc permettre que la répression d’actes ayant pour but d’empêcher ou de tenter d’empêcher une ou plusieurs personnes déterminées de s’informer sur une interruption volontaire de grossesse ou d’y recourir. Selon la seconde, sauf à méconnaître également la liberté d’expression et de communication, le délit d’entrave, lorsqu’il réprime des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d’intimidation à l’encontre des personnes cherchant à s’informer sur une interruption volontaire de grossesse, ne saurait être constitué qu’à deux conditions : que soit sollicitée une information, et non une opinion ; que cette information porte sur les conditions dans lesquelles une interruption volontaire de grossesse est pratiquée ou sur ses conséquences et qu’elle soit donnée par une personne détenant ou prétendant détenir une compétence en la matière. V., CC, Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017,Loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, JO n° 0068 du 21 mars 2017 texte n° 4, cons. 14 et 15.

[80] Selon l’article 37-1 de la Constitution, « La loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental ».

[81] CC, Décision n° 2009-584 DC du 16 juillet 2009, Loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, JO du 22 juillet 2009, page 12244, texte n° 2.

[82] CC, Décision n° 2011-640 DC du 4 août 2011, Loi modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, JO du 11 août 2011 page 13787, texte n° 8.

[83] V. La loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, JO n° 0022 du 27 janvier 2016.

[84] V. La loi n° 2022-295 du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l’avortement, préc.