L’arme sémantique de Bruno Retailleau contre l’État de droit ou le concept d’« impossibilisme »

Alexandre VIALA.

Dans le prolongement de son best-seller Les ingénieurs du chaos[1], consacré au phénomène des spin doctors qui ont contribué partout dans le monde, depuis l’émergence du mouvement 5 étoiles en Italie, au succès électoral des populismes,l’essayiste Giuliano da Empoli vient de publier dans la même veine L’heure des prédateurs[2]. Au terme d’un ouvrage de fiction dans lequel il s’imagine en scribe aztèque comparant l’étrange association des ingénieurs de la Silicon Valley et des « César Borgia » d’aujourd’hui avec les conquistadors du XVIème siècle, l’écrivain italo-suisse revient sur cette alliance contemporaine entre les magnats de la tech et le pouvoir des autocrates nationalistes dont le succès du trumpisme constitue l’illustration la plus récente. L’auteur y dresse un tableau sombre du paysage géopolitique actuel au sein duquel un nouveau Davos a remplacé celui auquel nous étions jusque-là habitués. Tandis que dominaient, depuis la chute du mur de Berlin et le triomphe planétaire du libéralisme, des technocrates « modérés, ennuyeux, plus ou moins indifférenciés, qui gouvernaient leur pays sur la base des principes de la démocratie libérale »[3], voilà que s’imposent désormais des « borgiens qui se concentrent sur le fond, pas sur la forme »[4]. Et qui « promettent, ajoute l’auteur, de résoudre les vrais problèmes du peuple : la criminalité, l’immigration, le coût de la vie »[5].

La rhétorique montante contre l’État de droit

Dans ce nouveau chaos, conforté par le retour de Donald Trump au pouvoir, la logique de la puissance et des rapports de force, tant sur le plan interne des démocraties qu’à l’échelle des relations internationales, monte en gamme au détriment du vocabulaire et des principes constitutifs de l’État de droit. Le trumpisme se répand dans les discours d’une partie de la classe politique française qui n’hésite plus, notamment à l’extrême-droite et même au sein de la droite républicaine, à mettre en cause l’État de droit auquel est imputée la responsabilité des crises qui déchirent la société[6]. Cette rhétorique n’est pas tout à fait neuve et ne coïncide pas avec le début du second mandat du milliardaire américain à la Maison blanche. Depuis plusieurs années, se multiplient les discours critiques à l’endroit des contre-pouvoirs juridictionnels accusés, de manière caricaturale et approximative, de paralyser l’action de l’État et de sacrifier l’intérêt général sur l’autel de la défense des minorités[7].

Je me souviens d’une séance ordinaire de l’Association française de droit constitutionnel à laquelle j’avais assisté, au milieu des années 2010. Ce jour-là, était organisée une table ronde pour débattre de la question des libertés au sein des États de l’Union européenne. Les membres de la société savante, composée en grande partie d’enseignants-chercheurs en droit constitutionnel, invitaient à cette occasion un élu politique, comme ils le font parfois, pour tirer les enseignements de son expérience en vue de les confronter à la théorie et d’en dégager des conclusions sur l’évolution contemporaine du droit constitutionnel. L’hôte politique du jour était un élu issu des rangs de la droite républicaine qui, malgré sa notoriété d’alors, ne jouissait pas encore, à l’époque, de la visibilité médiatique qu’il détient aujourd’hui. Sous des dehors policés, courtois et très urbains, il tenait des propos qui avaient néanmoins sidéré l’auditoire, nourri au lait d’une culture juridique associée aux valeurs de l’État de droit. En vue d’aider la puissance publique à lutter contre l’immigration clandestine et à limiter plus drastiquement qu’auparavant l’immigration légale, l’invité préconisait rien de moins que la révision de l’article 55 de la Constitution qui affirme le principe de la supériorité des traités internationaux ratifiés par la France sur les lois nationales. Parmi ces traités, figure en effet la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 qui protège les droits les plus élémentaires de la personne comme le droit à la vie privée ou le droit à une vie familiale normale et renferme, par voie de conséquence, autant d’obstacles potentiels à la volonté d’un État qui souhaiterait durcir par la loi, de façon disproportionnée, sa politique migratoire. Pour autant, de telles dispositions n’ont jamais empêché les États, auxquels la Cour européenne des droits de l’homme reconnaît au demeurant une marge nationale d’appréciation, de limiter l’entrée et le séjour des étrangers sur leur sol national. La révision de l’article 55 en vue de soustraire la France à ses obligations internationales qui l’enjoignent de respecter les libertés individuelles trahissait donc, dans l’esprit de l’orateur, une appétence singulière pour des orientations institutionnelles qu’il est courant d’observer au sein même des démocraties illibérales.

L’orateur en question s’appelait Bruno Retailleau qui estimait souhaitable que l’État puisse échapper aux contraintes du droit international au mépris d’un principe que partagent tous les régimes constitutionnels qui appartiennent au camp des démocraties libérales. Ce principe, né au lendemain de la Seconde guerre mondiale lorsque le monde fut délivré de la barbarie des régimes totalitaires, garantit que les nations respectent les engagements qu’elles prennent avec d’autres nations. Il fut destiné, à la faveur de ces engagements réciproques, à protéger tout individu d’où qu’il vienne contre les abus du pouvoir des États. Les propos tenus aujourd’hui par celui qui est désormais ministre de l’intérieur ne font que confirmer, au fond, ce que le même responsable politique avait osé imaginer et suggérer dans le cercle étroit et intime d’un parterre d’universitaires lorsqu’il était encore sénateur. C’est ainsi qu’à l’automne dernier, dans les colonnes du Journal du dimanche, Bruno Retailleau réagissait au meurtre d’une étudiante, prénommée Philippine, par un ressortissant étranger frappé d’une obligation de quitter le territoire français, en dénonçant l’impuissance de l’État de droit[8]. Le fait divers donnait au ministre de l’intérieur, qui regrettait à juste titre que le drame n’aurait pas eu lieu si son bourreau eût été privé de liberté, l’occasion de dénoncer l’inaptitude d’un système judiciaire et policier dont l’impuissance serait à mettre au compte des règles constitutionnelles qui limitent les conditions du recours à la rétention de sûreté. Dès lors que l’État de droit rendrait impossible la protection des français contre des individus dangereux, il convenait selon le ministre d’amoindrir le poids des règles qui encadrent la volonté de l’État. Et de conclure que « l’État de droit n’est pas intangible, ni sacré »[9]. De là résulte son aspiration à changer les règles de droit afin qu’elles préservent, comme il le clame souvent, « davantage la société que les délinquants »[10].

Naissance d’un concept dépréciatif

 A l’appui de ce narratif déplorant un excessif encadrement de la puissance publique, Bruno Retailleau a construit, depuis qu’il est ministre de l’intérieur, une sémantique pour définir ce qui, à son grand regret, empêche l’État de faire ce qu’il veut : « l’impossibilisme » juridique[11]. Voilà un néologisme significatif que le locataire de la place Beauvau emploie désormais fréquemment pour définir de façon dépréciative l’État de droit. Ce terme revêt le même statut pragmatique, du point de vue de la théorie du langage, que celui que renferme le syntagme « droit-de-l’hommisme » dans la bouche ou sous la plume de ceux qui critiquent l’humanisme : celui d’un énoncé à connotation péjorative ayant vocation à dénoncer un excès de droits de l’homme qui contribuerait à la dissolution des liens sociaux, comme l’ont bien montré Justine Lacroix et Jean-Yves Pranchère [12]. Le concept peut, de prime abord, paraître étrange aux yeux du juriste qui n’ignore pas que l’objet auquel il s’intéresse, le droit, a ceci de spécifique qu’il est révocable ou susceptible d’interprétations si variées que la notion d’impossibilité lui est étrangère. S’il est impossible, en effet, de défier les lois scientifiques comme celle de la gravité universelle, il sera toujours possible, en revanche, de transgresser les lois juridiques comme l’interdiction non moins universelle de l’inceste.

Le terme choisi par Bruno Retailleau, qui semble inapproprié pour définir le droit positif dont il s’agit de déplorer le poids contraignant qu’il exercerait sur la liberté des gouvernants en raison d’un empilement excessif de lois et de jurisprudences, ne peut alors se comprendre qu’à la lumière d’un vieux débat théologique de la période scolastique qui constitue l’une des sources les plus importantes, bien qu’elle soit largement ignorée par la doctrine juridique, de ce qu’on appelle aujourd’hui l’État de droit. La rhétorique du ministre de l’intérieur traduit en effet toute la distance prise par sa propre conception de l’État avec un noble héritage qu’il devrait pourtant bien se garder de négliger, lui qui tient tant à la préservation des racines chrétiennes de l’Europe. Cet héritage indique que la notion d’impossibilisme, négative dans l’esprit du ministre, gît à la racine du concept moderne d’État de droit. Celui-ci repose en effet sur une théorie très ancienne, rarement mise en lumière, qui pourtant mériterait d’être davantage valorisée. Il s’agit d’une conception de la puissance divine, datant du XIIIème siècle, développée par Thomas d’Aquin (1225-1274). Selon le grand théologien italien de la période scolastique en effet, Dieu ne peut pas faire ce qu’il veut. S’il est puissant au point d’avoir engendré le monde, il ne saurait néanmoins être en mesure de défier les lois qui gouvernent l’ordre naturel du monde. Sa souveraineté s’arrête là où s’impose la raison qui nous enseigne l’existence d’une causalité, propre à la nature, qu’aucune volonté fût-elle divine ne peut remettre en cause. En d’autres termes, Thomas d’Aquin réfute l’idée que Dieu puisse accomplir des miracles. Tels sont les termes dans lesquels peut être repérée, dans la pensée médiévale, l’illustration de l’impossibilisme. Ce concept désigne les limites auxquelles se heurte toute volonté, y compris celle d’un souverain : ce sont les limites tracées par la raison. Cette thèse thomiste, qui conciliait la foi chrétienne et l’attachement aristotélicien à la raison (fides et ratio), est justement celle à laquelle Bruno Retailleau tourne le dos dans sa dénonciationde ce qu’il appelle l’impossibilisme pour cibler l’État de droit dont il dénonce l’impuissance.

Querelle théologique et État de droit

Sous l’autorité de Thomas d’Aquin, en effet, va se répandre dans l’occident médiéval une grande tradition qui assume l’héritage du judéo-chrétiannisme tout en demeurant attachée à la philosophie d’Aristote[13]. L’auteur de la Somme théologique est réputé pour avoir jugé qu’il était légitime de concilier la foi et la raison[14]. Dans l’esprit du « Docteur angélique », le legs du christianisme aux termes duquel le logos résiderait dans une personne unique, transcendante par rapport au cosmos et susceptible de s’incarner en l’homme, est pris au sérieux sans être interprété, toutefois, avec le même intégrisme que défendra après lui le théologien anglo-saxon Guillaume d’Occam (1285-1349). Thomas d’Aquin appartient en effet à l’ordre dominicain qui se réclame du réalisme et pour lequel Dieu est une puissance ordonnée (potestas ordinata), c’est-à-dire limitée par la raison, la sagesse et les lois causales de la nature. A l’inverse, la tradition franciscaine à laquelle était rattaché d’Occam, se présente comme idéaliste et accorde à Dieu, dans le prolongement des idées révolutionnaires de Duns Scot (1266-1308), une puissance absolue (potestas absoluta) qui lui permettrait d’opposer sa volonté à l’ordre naturel des choses.

La nette opposition entre le rationalisme thomiste et le volontarisme occamien prit une tournure significative autour de la question du « mal en soi » (des mala in se) qui avait constitué, au Moyen Age, un grand objet de disputatio. Dans une perspective aristotélico-thomiste, le mal en soi est objectivement connaissable sans qu’il ne soit nécessaire, pour le définir, de mobiliser une quelconque volonté législatrice, qu’elle soit d’origine divine ou profane. En revanche, du point de vue volontariste de Guillaume d’Occam, il ne saurait exister de définition naturelle et intrinsèque du mal, de sorte que Dieu est si puissant et si libre qu’il est capable d’ordonner la haine de Dieu. Où l’on voit, du point de vue de la théorie du droit, que dans les linéaments de la pensée subjectiviste occamienne, résident les germes de la future doctrine légicentriste selon laquelle il n’y a de crime que celui réprimé comme tel par la loi. Les vertus de cette équation volontariste sont bien connues : elles résident dans la non-rétroactivité des lois pénales qui ne sauraient s’appliquer à des faits survenus antérieurement à leur promulgation, c’est-à-dire à un moment où leurs responsables ignoraient qu’ils accomplissaient ce qui n’était pas encore légalement tenu pour le mal. Mais ce principe de sécurité juridique, résultant d’une conception volontariste du droit, a dû s’éclipser, bien évidemment, lorsque le tribunal de Nuremberg jugea les chefs nazis pour des actes qui avaient été perpétrés avant que ne soit créée la qualification de crimes contre l’humanité. Aucune autorité législatrice n’ayant osé imaginer les atrocités que commettraient les responsables du troisième Reich avant que n’adviennent les faits découverts par la libération des camps de la mort, le tribunal de Nuremberg a dû inventer une qualification juridique à titre rétroactif en la tenant pour constitutive du mal en soi, c’est-à-dire en faisant comme si elle était incréée. Il est des circonstances historiques exceptionnellement dramatiques, en effet, qui révèlent fort logiquement les limites et surtout les dangers du dogme de la souveraineté issu de la tradition volontariste occamienne[15]. D’où l’impérieuse nécessité, au lendemain de la Seconde guerre mondiale, d’opposer à ce dogme celui de l’Etat de droit dont l’application concrète se manifestera, à partir de 1949 en Allemagne avec l’institution du Tribunal de Karlsruhe, par une vague progressive de créations de cours constitutionnelles partout dans le monde occidental.   

Certes, le lien entre la tradition thomiste et le rationalisme juridique ne saurait éluder celui, davantage mis en évidence dans l’histoire de la pensée politique, entre l’héritage intellectuel du docteur angélique – lequel, faut-il le rappeler, justifia l’esclavage au nom de la nature – et une certaine renaissance du droit naturel au XXème siècle, d’essence conservatrice, qui s’est déployée contre les idées modernes du progès et l’individualisme auxquels il est courant, par contre, d’associer la déconstruction nominaliste des universaux impulsée par Guillaume d’Occam. Mais il n’en demeure pas moins que l’affirmation du primat de la raison sur la volonté constitue, chez Thomas d’Aquin, un des germes les plus précieux (pourtant largement méconnu) de la doctrine de l’Etat de droit. Ni Maurice Hauriou, favorable à l’émergence d’un contrôle de constitutionalité des lois en France, ni Etienne Gilson ou Jacques Maritain attachés aux droits de la personne, lesquels furent tous de notables esprits ouverts aux idées thomistes, ne l’ignoraient.

A la faveur de cette opposition entre le principe contraignant de l’État de droit et le dogme absolutiste de la souveraineté, se dessine ainsi la querelle entre l’impossibilisme, fustigé par Bruno Retailleau, qui inscrit la volonté dans les limites tracées par la raison et l’illimitisme ou volontarisme exacerbé, qui accorde à la foi davantage de poids qu’à la raison au point de reconnaître à Dieu, par la voie du miracle, l’aptitude à défier l’ordre naturel des choses. Cette notion théologique du miracle, révolutionnaire et scandaleuse par rapport à l’héritage grec d’Aristote en raison du rôle hypertrophié qu’elle attribue à la volonté, trouvera plus tard un écho dans la notion de souveraineté, caractéristique du droit public moderne, quin’est rien d’autre, selon certains auteurs, qu’un « concept théologique sécularisé », à l’instar de nombreux autres concepts juridiques modernes[16]. L’idée de miracle divin que rejetait Thomas d’Aquin est aux théologiens ce que représente la souveraineté de l’État aux yeux des constitutionnalistes : une puissante et déraisonnable affirmation de la volonté. Telle est l’orientation qu’une partie de la classe politique française et européenne, subissant l’influence du trumpisme, affectionne aujourd’hui. En atteste le débat actuel sur la liberté d’expression dont certains leaders d’opinion, s’inspirant des propos tenus le 14 février 2025 par le vice-président J.D. Vance dans sa conférence de Munich sur la sécurité européenne, considèrent qu’elle ne devrait pas être régulée.

Dans L’heure des prédateurs, Giuliano da Empoli dresse le portrait deces leaders « borgiens » qui croient au miracle politique et ne cherchent plus à respecter les réquisits formels de la raison juridique. L’essayiste rappelle alors l’usage d’un concept, très en vogue au Kremlin, à la tentation duquel succombent ces politiques aux yeux desquels le droit est un obstacle qui rend leurs desseins impossibles : le « contrôle manuel ». Ainsi écrit-il : « Quand le système, avec ses procédures et ses hiérarchies, ne produit pas le résultat désiré, demeure la possibilité d’intervenir directement, en transgressant les règles formelles, pour rétablir la justice substantielle. Il en résulte une forme de miracle, au sens littéral du terme, puisqu’un miracle n’est autre chose que l’intervention directe de Dieu sur terre »[17].

C’est contre cette doctrine volontariste d’une puissance débridée, caractéristique des régimes despotiques, que s’est toujours affirmée la sage tradition thomiste en ouvrant le chemin aux théories de l’État de droit, dont le pouvoir n’est pas illimité. Une tradition chrétienne que Bruno Retailleau, qui ne fait pourtant jamais mystère de son catholicisme, a manifestement oubliée. Mais sans doute croit-il encore au miracle et place-t-il la foi au-dessus de la raison. Inclination qui lui permet de s’épanouir politiquement à l’heure des prédateurs de notre époque mais qui l’éloigne du legs rationaliste de la république laïque qu’il est censé servir en qualité de ministre.

Alexandre VIALA,

Professeur de droit public à l’Université de Montpellier

CERCOP


[1] G. da Empoli, Les ingénieurs du chaos, JC Lattès, 2019.

[2] G. da Empoli, L’heure des prédateurs, Gallimard, 2025.

[3] Ibid., p. 109.

[4] Ibid., p. 83.

[5] Ibid., p. 83.

[6] M. Darame, Comment le trumpisme infuse en France, Le Monde, 4 mars 2025, p. 8.

[7] M. Afroukh, Des propositions ineptes contre la Cour européenne des droits de l’homme, AOC 29 novembre 2021 ; A. Viala, Carl Schmitt aurait-il gagné la bataille des idées ? in M. Afroukh (dir.), En finir avec les idées reçues sur la  Convention européenne des droits de l’homme, Paris, Mare et Martin, 2023, p. 37 ; M. Afroukh, Loi immigration, exemple caricatural de la diffusion d’idées reçues sur la CEDH, AOC 17 janvier 2024.

[8] B. Retailleau, interview du Journal du dimanche, 28/09/2024.

[9] Ibid.

[10] Formule qu’il réitère, à propos de la lutte contre le terrorisme, dans son discours récemment publié et prononcé à Londres, le 31 mars 2025, à l’invitation du Think tank Policy Exhange (B. Retailleau, Ne rien céder. Manifeste contre l’islamisme », Éditions de L’Observatoire, p. 18).

[11] B. Retailleau, Ma volonté politique peut briser « l’impossibilisme », entretien du Journal du dimanche, 8/02/2025.

[12] J. Lacroix et J-Y. Pranchère, Le procès contre les droits de l’homme, Seuil, coll. « La couleur des idées », 2016 ; Les droits de l’homme rendent-ils idiots ?, Seuil, coll. « La république des idées », 2019.

[13] Thomas d’Aquin est connu pour avoir mêlé les apports du judéo-christianisme, auxquels se grefferont ceux de l’islam, qui révèlent que Dieu – un seul – est doté d’une volonté subjective et transcendante par rapport au monde qu’il a créé, avec l’héritage de la philosophie d’Aristote qui enseigne que le cosmos est un ordre objectif dont la réalité s’impose au sujet. Si Thomas d’Aquin entreprend cette synthèse entre Athènes et Jérusalem au service du christianisme, c’est Averroès qui conciliera l’héritage de la pensée d’Aristote avec l’islam et Maïmonide avec le judaïsme. Sur cette question, cf., M. Villey, La formation de la pensée juridique moderne, Paris, PUF, coll. Léviathan, 2003, p. 149 et s.

[14] Tel est, au demeurant, le titre d’une encyclique du pape Jean-Paul II qui n’a jamais caché son admiration pour le « Docteur angélique » et sa proximité doctrinale avec sa pensée. Cf., Jean-Paul II, Fides et ratio, Éditions du Cerf, 1998.

[15] Des limites qu’ont mises en évidence un auteur comme Robert Kolb qui déclare : « L’idée de toute-puissance du législateur divin, puis humain, avancée par les volontaristes a ouvert la voie aux systèmes absolutistes, puis despotiques ; alors que la tradition thomiste a ouvert la voie aux théories de l’État constitutionnel dont le pouvoir est limité. L’alliage du positivisme avec le nominalisme (constante dans l’histoire) ne permet donc pas, en dernière analyse, de comprendre le droit autrement que comme un phénomène de pouvoir et non de raison (dans laquelle le positivisme n’a aucune confiance). Le droit culmine dans la toute-puissance du législateur de le poser ».(R. Kolb, in Préface à H. Kelsen, Controverses sur la Théorie pure du droit. Remarques critiques sur Georges Scelle et Michel Virally, C. Leben (éd), Paris, L.G.D.J., Éditions Panthéon-Assas, 2005, p. 61).

[16] Pour reprendre la fameuse expression du juriste allemand anti-libéral Carl Schmitt, adversaire de Kelsen et pourfendeur de l’État de droit, qui écrit que « les concepts juridiques modernes sont des concepts théologiques sécularisés » (C. Schmitt, Théologie politique, 2ème éd., 1934, trad. J-L Schlegel, Paris, Gallimard, 1988, p. 46 et s).

[17] G. da Empoli, L’heure des prédateurs, op. cit., p. 62.