Pour une justice financière des ministres ?

Anne-Charlène BEZZINA.

« Le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation »[1]

« Responsable mais pas coupable », la phrase est restée dans les annales et pour cause, elle traduit l’irréductible faiblesse du droit à saisir la responsabilité ministérielle. Cette faiblesse politico-pénale n’est pas la seule à devoir être dénoncée ; en effet, si en France sous la Ve République les ministres sont bien responsables de la politique financière (ils dirigent les administrations et sont ordonnateurs principaux[2]), ils n’en restent pas moins irresponsables devant les juges financiers, civils, administratifs ou constitutionnels. Aucune justice financière n’existe pour les ministres de la République. Il n’en fût pas toujours ainsi dans l’histoire constitutionnelle française.

La question historique de la responsabilité ministérielle peut se résumer en ces termes : « (une) rencontre (…) à la fois précoce, inopinée et brutale » ; rencontre qui a ouvert la boîte de Pandore autour de la dichotomie entre responsabilité politique et pénale[3]. Peu prompte à la responsabilité politique, la Constituante de 1791 retint la responsabilité pénale des ministres en les rendant coupables d’un délit original, celui de mésusages des deniers publics : « les ministres sont responsables de tous les délits par eux commis (…) de toute dissipation des deniers destinés aux dépenses de leur département »[4]. Sous le régime de la Constitution de l’an III, une même forte responsabilité ministérielle fut à l’œuvre : le Conseil exécutif était « entendu toutes les fois qu’il a(vait) un compte à rendre »[5].

Mais cette responsabilité historique se devait d’être pénale ou de ne pas être, les révolutionnaires – progressivement restreints dans leur volonté de pénaliser toute l’action publique – conservèrent une vision des infractions aux finances publiques de l’ordre de la criminalisation de l’action exécutive.

Cette responsabilité s’est évanouie avec le temps, prise en étau entre la pénalisation de l’action publique individuelle et la collectivisation politique de la responsabilité des actes. Les finances avaient disparu.

La gestion des deniers publics est pourtant une question qui a occupé la doctrine, la jurisprudence et le droit depuis l’Ancien régime et les premières sociétés. Le denier a cette valeur symbolique d’être issu de l’effort citoyen. Un contrat social réside à lui seul dans le jeu des articles 13, 14 et 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789 qui prônent une collectivité de responsabilité autour de la dépense de l’argent public doublée d’une gestion politique représentative sous le contrôle citoyen. Tout relève, dans la conjonction de ces articles, en premier ou au dernier lieu, de ce contrôle. Mais en tant qu’agent, en tant qu’intermédiaire dans la gestion de l’argent, les fonctionnaires, les comptables, les ministres doivent rendre compte ; c’est le sens même de la mission qui leur est confiée.

Lors de sa création en 1807, la Cour des comptes devait dénoncer les abus et malversations des ministres, mais seulement à l’Empereur.[6]. Dans cette énonciation historique se trouve contenu tout le paradoxe de la justice financière ministérielle. S’il peut exister des juridictions aptes à juger les ministres, ces dernières doivent rester confinées dans le secret des arcanes du pouvoir. Depuis 1807, les mouvements de transparence et d’éthique publique ne parviennent pas à percer à jour cet ilot d’injusticiabilité financière.

Il est donc temps de proposer une justice financière des ministres. Partant de ce qu’elle n’est pas (I), il sera proposé de comprendre ce qu’elle doit être (II) : un dû à la démocratie de la confiance.

I. Qu’a été la responsabilité financière des ministres jusqu’à présent : Rien

Comme Sieyès l’a fait pour le Tiers-état[7], il est important de mettre à jour en quoi la justice financière des ministres n’est rien, là où elle est pourtant nécessaire et sous-jacente. La justice financière des ministres a sans cesse été limitée (A) et lorsqu’elle a été souhaitée, elle a été reléguée (B).

A. Une responsabilité limitée

L’absence de justice financière pour les ministres est une vieille antienne. Depuis 1789 et l’interrogation sur les nouvelles bases de la démocratie parlementaire, la question de la responsabilité financière des ministres a été posée en termes politiques. Le ministre, parce qu’il gère les comptes, devrait pouvoir être mis en cause civilement en tant que gestionnaire des deniers. Toutefois, étant donné que ces deniers sont publics (car acquis par l’impôt) et que les ministres sont des élus de la République, une responsabilité civile ordinaire, sur le modèle de celle des comptables n’a pas lieu d’être. On pourrait paraphraser le raisonnement du Tribunal des conflits dans la décision Blanco rendue le 8 février 1873 et y voir une inadéquation des lois du Code civil aux gestionnaires de l’argent public et partant, une impossibilité d’appliquer les règles de la responsabilité classique à tout gestionnaire de deniers acquis par l’impôt.

Perdue dans cette dialectique, la responsabilité financière des ministres fut donc pensée au prisme contradictoire des articles 14 et 15 de la DDHC de 1789 comme une responsabilité politique. La création d’une justice financière propre à juger des agissements des ministres apparaît aux origines comme une forme de contournement de la compétence parlementaire, une manière de se dérober au « devoir des représentants de la nation d’entendre eux-mêmes le compte de la gestion et du maniement de ses finances […] C’est par nos yeux que la nation a voulu connaître la situation de ses affaires et elle ne nous a pas autorisés à subdéléguer cette importante délégation »[8].

Les citoyens ont un droit de regard sur l’impôt, ils doivent avoir un droit au contrôle des agents qui en dépensent l’argent perçu et ce contrôle politique est celui de l’élection[9], de la résistance à l’oppression[10], des mécanismes du régime parlementaire[11] où l’Exécutif mauvais gestionnaire peut être démis par les représentants élus par un processus révocatoire politico-démocratique[12]. Quant à l’article 15 de la DDHC de 1789, il permet de mettre en place une responsabilité pécuniaire des « agents » ; mais un ministre est-il un « agent » comme un autre ? La suite nous enseignera que non.

De Constitutions en Constitutions, la responsabilité politique des ministres n’a pas rencontré la justice financière ; les deux phénomènes ayant suivi un processus orthogonalement opposé au nom d’un concept insaisissable : celui de la liberté du Gouvernement à juger de la responsabilité des ministres qui le composent.

Alors qu’une juridiction financière est créée et qu’elle doit être juge des fautes de gestion, la Cour des comptes dans le système de 1807 laisse au Gouvernement « toute liberté quant à l’appréciation de la responsabilité de ses agents et des conséquences à en tirer »[13]. L’institution est qualifiée d’institution « qui seconde et n’entrave jamais la marche du Gouvernement »[14]. Justice financière il y aura mais toujours pas pour les ministres, précisément avec la loi du 16 septembre 1807[15], il est défendu à la Cour de s’attribuer juridiction sur les ordonnateurs. En raison de la notion de bonne marche du Gouvernement, les Chartes de 1814 et 1830 ne reprendront plus même à leur compte la consécration de la Cour des comptes comme juge financier et resteront silencieuses quant à la responsabilité financière des ministres.

La succession des textes relatifs à la justice financière poursuivra cette gigantesque omission. Élément politique marquant, la LOLF de 2001[16] dans sa grande démarche de « constitution financière » n’abonna ni n’aborda directement, l’idée maîtresse d’une justice financière à deux vitesses fondée sur une injusticiabilité des actes des ordonnateurs les plus hauts placés.

In fine, une question se pose à l’issue de cette revue historique : la responsabilité politique parlementaire des membres du Gouvernement peut-elle véritablement constituer une « justice financière » ? C’est pourtant là l’argument historique central : les ministres n’ont à rencontrer la justice financière qu’au travers de leurs actes politiques et jouent leur responsabilité de gestionnaire dans les urnes ou le cénacle du Parlement.

Il conviendrait en conséquence de trouver dans la responsabilité politique arrêtée par la Constitution une marge laissée au jugement financier des actes de l’Exécutif. Pourtant, la responsabilité des ministres est particulièrement encadrée sous la Ve République. L’article 50 de la Constitution prévoit une responsabilité de type parlementaire qui fonctionne au gré des motions de censure et engagements de responsabilité spontanés (sur programme ou sur la base d’un article 49 alinéa 3 de la Constitution). Ce jeu politique est par nature limité. Dans tous les régimes parlementaires, l’engagement de responsabilité est rare et suit le jeu des alliances d’oppositions, même si la corruption des affaires et les soupçons d’accointances financières peuvent justifier une motion de censure de manière rare et remarquée[17]. Le renversement du Gouvernement est un fait exceptionnel sous la Ve République et l’instabilité politique des Républiques précédentes ne saurait tenir lieu de modèle d’engagement de responsabilité financière. Au contraire, sous la IVe République la plupart des gouvernements démissionnaient avant d’être mis en cause selon les formes constitutionnelles, faisant suite au désaveu prévisible de certains partis d’alliance. De même, la responsabilité politique ne pouvait véritablement tenir lieu de jugement financier au vu de la pratique courante des décrets-lois qui permettaient au Gouvernement d’éviter sciemment tout contrôle de l’Assemblée en prenant en matière financière des mesures d’ordre législatif[18].

Si une réponse avait pu sembler avoir été apportée par la réforme constitutionnelle de 2008 dans le maintien de l’article 49 alinéa 3 aux seuls textes financiers, cette réponse n’est clairement pas de nature à établir une justice financière pour les actes de l’Exécutif. Les travaux parlementaires démontrent clairement que c’est en faveur du Gouvernement que cette procédure a été maintenue de manière à permettre le passage des budgets dans le respect des temps imposés par le principe d’annualité[19]. La pratique récente des engagements de responsabilité sur le texte du budget, outre une confiscation du pouvoir financier du Parlement, n’a pas conduit à un âge d’or de la responsabilité politique du Gouvernement en termes financiers ; aucune particularité de la responsabilité financière gouvernementale n’étant constitutionnellement reconnue[20].

B. Une justice évitée

Le système concurrent de justice financière pour les comptables et de mise en cause politique pour les ordonnateurs élus a montré des limites qui sont paradoxalement à l’origine de l’accumulation historique de textes relatifs à la bonne gestion des deniers publics.

Dès le XIXe siècle, le législateur a consacré le principe de la responsabilité pécuniaire des ordonnateurs pour « dépassement des crédits »[21]. En ce sens, par exemple, l’article 151 de la loi de finances du 25 mars 1817 prévoit que « la dépense ne peut excéder le crédit en masse ouvert à chacun des ministres » ; cette prescription a continué à être appliquée avec une culpabilité pour « forfaiture »[22] pour les cas d’engagements irréguliers de deniers publics opérés par des ordonnateurs.

L’ordonnance du 14 septembre 1822 relative à comptabilité des dépenses publiques est en ce sens secondée par la loi du 25 septembre 1948[23] voire par la création en 1993 de la Cour de Justice de la République mais également, en 2013, par celle du Parquet national financier pour combler le vide juridique laissé par la fenêtre d’irresponsabilité maintenue au profit des membres du Gouvernement.

La justice financière des ministres a donc reposé historiquement sur un mouvement antagoniste entre une limitation continue de la justiciabilité des actes financiers des ministres et la recherche de leur responsabilité à des fins de rétablissement de confiance dans la démocratie. Le constat ci-dessous, lu au détour d’un commentaire par le Conseil constitutionnel de sa décision QPC, pourrait être appliqué à l’ensemble de la législation en matière de responsabilité financière des ministres : les « texte(s) (sont) resté lettre morte en raison de (leur) trop grande rigueur »[24].

Bien que la justice financière ait été sans cesse recherchée durant l’histoire, elle a été évitée dans la pratique dès qu’elle aurait pu se présenter. L’exemple de la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) et du traitement constitutionnel qui lui a été réservé par le Conseil constitutionnel suffit à le démontrer[25].

Partant de l’échec de la création de la Cour des comptes pour juger des actes des ordonnateurs, la loi de 1948[26] créant la CDBF a pris le pari de créer un véritable champ nouveau du droit public[27] : le droit punitif administratif qui, outre en matière fiscale, n’avait guère lieu de se développer avant que l’avènement de la sanction administrative fit florès avec l’expansion des autorités administratives indépendantes[28]. L’idée maîtresse, à l’instar des contraventions de grande voirie, consistait à instituer une juridiction administrative non pénale non disciplinaire. Bien que le Conseil constitutionnel en ait décidé autrement, il ne nous semble en effet nullement que, pour les ministres, la répression des manquements portés aux règles de gestion des finances publiques ne constitue une faute disciplinaire. Sauf à réduire par une confusion terminologique la gestion des finances publiques aux seuls agissements des agents publics, aucune discipline n’est à l’origine de la création de toutes les infractions financières. La responsabilité instituée en 1948 reposait au contraire sur le postulat d’une justice plus universelle permettant, pour des motifs de transparence publique, de mettre fin à l’impunité qui régnait dans la gestion des finances publiques[29].

Pourtant, bien que reposant sur un postulat de justice financière proprement dit, l’activité de la CDBF ainsi créée conduisit au rétrécissement insidieux mais perpétuel de la responsabilité financière des ministres. Cette Cour est restée un « Tigre de papier »[30] dès lors qu’ont été retirés de la liste des justiciables les ministres et élus locaux[31]. L’argument phare justifiant cette exclusion pouvant être résumé en ces termes : juger la gestion financière des ministres reviendrait à porter un jugement politique sur les actes de ces autorités[32]. La loi de 1948 instituant la CDBF a donc douché tous les espoirs possibles sur la responsabilité des gestionnaires publics, limitée pour les mêmes motifs historiques de séparation des pouvoirs et de bonne conduite des affaires gouvernementales.

Pourtant, la séparation des pouvoirs ne saurait être atteinte par une mise en cause de la responsabilité financière des membres de l’Exécutif. De plus, l’espace d’irresponsabilité gouvernementale lié à la notion de « bonne conduite des affaires gouvernementales» apparaît créé de toute pièce dans le seul but de soustraire les ministres à leur justice ; une pure notion fonctionnelle. Ledit motif est en réalité une forme de poursuite d’une facilité historique découlant de l’injusticiabilité des actes du Roi qui s’étendait à la matière financière[33]. En d’autres termes, dans l’injusticiabilité des actes financiers des ministres, la conséquence est en réalité la cause : c’est l’incapacité à saisir la responsabilité politique et publique des ministres qui conduit à la création du concept de bonne conduite des affaires gouvernementales.

La logique politique a donc récupéré celle de la justice financière au sein même du texte relatif à la justiciabilité de l’action des responsables politiques maniant des deniers publics[34].

On ne peut que regretter que, saisi de deux QPC complémentaires sur ces « bizarreries » de la justice financière, le Conseil constitutionnel ait donné un fondement constitutionnel à cette injusticiabilité ministérielle en se rangeant à un argument d’autorité[35]. La première décision QPC de 2014[36] consacra partiellement la nature sui generis de la responsabilité financière instituée devant la CDBF. En effet jamais le terme de responsabilité financière proprement dit n’a été employé. Même si ce détour n’était pas nécessaire à la poursuite du raisonnement du juge constitutionnel, on aurait pu espérer trouver ici la hardiesse qui conduit à la rédaction de certains obiter dictum du Conseil constitutionnel. Ainsi que le résume le rapport public de la CDBF pour 2023, la Cour est « juridiction financière distincte de la Cour des comptes(qui) remplit un office autonome, selon un droit spécifique et sur la base d’infractions légales qui lui sont propres »[37].

Enfin, dans la décision du 2 décembre 2016[38], le Conseil constitutionnel s’en est remis au raisonnement suivant lequel la responsabilité financière des ministres ne méritait pas de s’exercer devant la CDBF au motif que la responsabilité financière des ministres était de nature politique et ce de manière exclusive. Trois arguments vinrent au soutien de la décision pour rejeter les deux griefs de la requête consistant à dénoncer une inégalité devant la loi et une violation du principe de responsabilité au sens de l’article 15 de la DDHC de 1789. Tout d’abord, le Conseil constitutionnel rejeta l’argument tiré d’une quelconque rupture d’égalité en se fondant sur sa jurisprudence classique voulant qu’en vertu de l’article 13 de la DDHC de 1789, une différence de situation peut justifier une différence de traitement par le droit. Cette différence de situation aurait pu se discuter. L’existence de la responsabilité politique des articles 49 et 50 pour les élus nationaux et la responsabilité devant les assemblées délibérantes pour les élus locaux différencie certes les élus d’autres agents exécutants mais leur qualité d’ordonnateur aurait pu justifier une identité de traitement[39]. L’existence de la responsabilité politique est seule à justifier la différence de traitement sans proposer une lecture plus fine qui aurait pu permettre qu’un engagement civil de la responsabilité pécuniaire des membres du Gouvernement soit acté, eu égard à l’identité de leur mission avec les autres ordonnateurs. Ce faisant, le Conseil constitutionnel ne tire pas les conséquences de la précédente décision QPC qui reconnaît la nature sui generis des infractions financières pour appliquer une responsabilité des ministres qui le serait tout autant.

Autre différence que le Conseil constitutionnel a noté entre les différents ordonnateurs : la notion « d’ordre » reçu certes fonctionnelle pour les agents d’exécution mais pas pour les élus. Cette justification est pour le moins paradoxale si l’on note que précisément les autorités les plus hautes sont insusceptibles de recevoir des ordres mais peuvent en donner sans que leurs actes ne soient susceptibles de contrôle par la justice financière. Pourtant, le Conseil constitutionnel se range derrière un solide argument historique consistant à exclure du contrôle des juges financiers ou politiques, tous les actes rendus sur ordre du roi. La théorie de l’ordre donné couvre donc d’irresponsabilité certains actes par ricochet de l’irresponsabilité du donneur d’ordre sans pour autant qu’un motif juridique valable ne le justifie.

Enfin, le Conseil constitutionnel estime que l’article 15 de la DDHC de 1789 n’est pas violé par l’existence d’agents insusceptibles de « rendre compte » ; là-encore la responsabilité politique devient une justification de l’injusticiabilité financière.

L’argument constitutionnel de la responsabilité politique a donc conduit à l’échec de toute judiciarisation des actes financiers des ministres.

II. Que demande-t-elle à être : Quelque chose

L’action des ministres en tant qu’ordonnateurs n’a pas trouvé sa voie mais la recherche de justice ayant horreur du vide, qui plus est en matière financière, la responsabilité financière des ministres fut détournée (A) tant elle fut recherchée (B).

A. Une justice détournée

Toute la démocratie parlementaire française est assise sur le principe de consentement à l’impôt de l’article 14 de la DDHC de 1789. Dans le même sens, la procéduralisation de l’action publique, symbolisée par l’ordonnance de 1822, est le socle de toute confiance des électeurs dans l’action des élus. La Révolution a entendu avant toute chose mettre fin à l’impunité des gouvernants au cœur de la culture constitutionnelle française. Aussi, les questions de responsabilité et de justice financière se sont rappelées aux ministres durant l’histoire parlementaire et financière de la Ve République de manière détournée.

Le jugement étant la finalité et la voie de droit le moyen, certaines affaires judiciaires mettant en cause des ministres sont tout à fait susceptibles d’entrer dans les qualifications de la loi financière et prennent une voie détournée, devant le juge pénal, pour être jugées in fine. L’affaire Christine Lagarde[40] le démontre. La responsabilité financière de la ministre n’a pas pu être engagée là où elle aurait dû l’être du fait de la limitation des justiciables arrêtée par la loi. Dans le même sens, le seul ministre mis en cause dans l’affaire du Carrefour du développement, l’a été par la Cour des comptes grâce à une logique inversée : l’ordonnateur était comptable patent[41]. C’est ici l’un des plus grands échecs de la CDBF qui devait rétablir le jugement administratif dans le jugement des ordonnateurs et qui l’a finalement marginalisé. La pénalisation de l’action politique a préempté le champ des finances publiques conduisant à une confusion ontologique entre les infractions financières et celles de droit pénal financier. Ce ne sont donc pas les infractions financières qui seraient inadéquates avec l’action ministérielle mais simplement un évitement par la législation du champ financier de l’action gouvernementale qui justifie l’injusticiabilité des actes financiers des ministres.

Le constat suivant lequel les ministres voient leurs ordres financiers couverts par une injusticiabilité remarquable en démocratie parlementaire a conduit à une véritable escalade pénale due à la recherche irrépressible de judiciarisation. La création de Cour de Justice de la République (CJR) en 1993 aurait pu être pensée comme une voie possible de jugement des actes financiers des ministres. Certaines affaires retentissantes jugées par la Cour ont en réalité des incidences financières qui auraient pu être jugées plus utilement, directement et sincèrement, sous le prisme des finances publiques, plutôt que sous celui du droit pénal. A nouveau, la « négligence » dont a été déclarée coupable la ministre Christine Lagarde aurait pu se muer en une infraction financière en sa qualité d’ordonnateur mais surtout d’autorité hiérarchique.

La même recherche de justice et de transparence conduisit à la création du Parquet national financier en 2013[42]. Cette législation pénale financière a démontré l’imprécision du terme de finances dans la vie politique pouvant être utilement activé dans le champ budgétaire, pénal, politique ou même administratif. Sur une même affaire, le juge pénal spécial qu’est le Parquet national financier peut être secondé par le juge administratif dans son office de juge de l’impôt ou supplanté par la CJR si le ministre est jugé pour des affaires pénales mettant en cause ses fonctions politiques. Ce maelstrom juridictionnel démontre à quel point il est difficile de faire entendre aux acteurs politiques une idée « en ligne droite » de la responsabilité : pour leurs agissements mettant en cause des deniers publics, les ministres, en leur qualité d’ordonnateurs, devraient être jugés comme les comptables, sur leur gestion, par un juge spécifiquement financier.

In fine, le retentissement des affaires dans l’opinion est bien plus souvent lié à la dépense de l’argent public qu’elle induit injustement qu’à la recherche d’une quelconque responsabilité pénale qui ne vide pas le litige de son insatisfaction démocratique[43]. Aussi, l’injusticiabilité financière des actes des plus hautes autorités ordonnant la dépense publique ne peut pas ne pas rencontrer son juge sans conduire à une forme de défiance électorale.

B. Une justice recherchée

Ainsi la justice financière des ministres est à la recherche de sa concrétisation. Depuis les premiers régimes constitutionnels, l’ordonnateur ministériel, placé de facto hors du champ de la justice financière, avait emporté la suspicion des parlementaires. Mais la conséquence est parfois avancée comme une cause de l’injusticiabilité : il n’existerait pas de juridiction propre à juger des infractions budgétaires commises par les ministres ordonnateurs[44]. Aussi, la proposition de créer une responsabilité unique entre ordonnateurs et les comptables pour les actes financiers, a été formulée tôt dans l’histoire financière[45]. « Les erreurs les plus grossières, les manœuvres les plus frauduleuses peuvent se commettre (…) sans que la justice financière ait rien à y voir »[46] dénonçait déjà De Montcloux en 1840. Par la suite, en 1878, la proposition de loi Duprat proposait de moderniser la faute de prévarication pour l’assimiler à toute méconnaissance des crédits budgétaires[47]. La prévarication est d’ailleurs un concept nébuleux utilisé durant toute la période révolutionnaire sans qu’il n’apparaisse particulièrement efficient[48].

N’est-ce pas une exception française que de séparer autant et dans chacun des actes de la dépense publique les ordonnateurs et les comptables ? Ailleurs, c’est l’acte qui est jugé, peu importe la qualité de son auteur[49]. La confusion entre la recherche d’un régime de responsabilité financière des ordonnateurs et la recherche d’une responsabilité politique est sûrement à rechercher dans la création historique d’un délit de dépassement des plafonds et même plus largement dans l’incrimination générale de la conduite de la dépense publique par les ministres souvent crainte dans ses excès[50].

Pourtant, il nous semble que la voie de la justice financière des actes ministériels existe.

Tout d’abord, il faudrait mettre fin à la confusion entre responsabilité politique et civile en termes financiers. Si la responsabilité des comptables a pu être judiciarisée sans être pénalisée ou politisée, cette même voie peut être suivie pour les ordonnateurs. La décision QPC de 2014 précitée du Conseil constitutionnel reconnaît la nature sui generis des incriminations financières, ce qui prouve qu’elles peuvent être séparées d’un jugement politique. Dans le même sens, les élus locaux voient leur irresponsabilité limitée par les textes[51]. Pareille modularité mériterait pour le moins d’exister pour les ministres dont il ne s’agit pas nécessairement de juger tous les actes financiers. Autre piste : il conviendrait de séparer la faute de gestion ministérielle de toute faute personnelle. L’effet attractif de la notion de détournement de fonds publics conduit en effet parfois à une personnalisation organique d’une faute en réalité fonctionnelle.

Ensuite, il conviendrait de rétablir une logique dans le schéma des acteurs justiciables de la justice financière. Pourquoi déresponsabiliser les ministres là où les membres de leurs cabinets peuvent être poursuivis ? Le schéma historique du donneur d’ordre a vécu, nul n’est aujourd’hui dupe de l’origine des actes accomplis par les membres d’un cabinet. La transparence acquise autour de la composition et la rémunération des membres du cabinet, dissipe aujourd’hui l’obscurantisme de ces cellules et rend moins légitime leur caractère de « fusible » financier[52]. Egalement, à propos des acteurs responsables devant les juges financiers, il convient d’insister sur un point d’anachronisme : la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) a instauré une politique de gestionnaire des fonds publics et de responsabilisation des acteurs-gestionnaires qui rend plus fine la frontière entre ordonnateur et comptable au profit de la notion de « gestionnaire ». Or, retirer aux ministres cette qualité revient à les déresponsabiliser financièrement, ce qui suit un mouvement rétrograde au regard de l’évolution de la compétence de la juridiction administrative. Si l’injusticiabilité était justifiée lors de la création de la Cour des comptes en 1807, l’affirmation de la juridiction administrative démontre que le jugement des actes des ministres est aujourd’hui un acquis de la séparation des pouvoirs et de l’affirmation juridictionnelle du jugement de l’Exécutif. La justice financière des ministres pourrait ainsi être administrative et objective, comme l’est l’appréciation de la « faute » de l’administration, par exemple en matière fiscale[53]. La recherche de plus en plus grande d’objectivation dans la poursuite des actes de l’administration conduit à une affirmation du principe contentieux face à l’historique ténacité du « secret des affaires » ou de la « bonne conduite financière de l’action ministérielle ».

La dernière réforme de l’Ordonnance n°2022-408 du 23 mars 2022 relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics uniformise le régime de responsabilité financière pour les ordonnateurs et les comptables et la compétence juridictionnelle autour de la seule Cour des comptes. Pour autant, la rareté avec laquelle la lourdeur des incriminations conduira à une condamnation est emprunte de la même parcimonie à condamner le politique. Que la faute de gestion soit lourde pour impliquer la condamnation pourrait se justifier, si ce critère n’était pas encore aggravé par la recherche d’un préjudice financier significatif qui rendra toute condamnation pour le moins exceptionnelle. Il conviendrait donc de proposer que la notion de « faute grave dans la gestion » créée par le nouveau texte puisse s’appliquer aux ministres. Cette faute, ni criminelle, ni politique, pourrait être recherchée sur la base de ce qui a déjà été défini par la CDBF pour les ordonnateurs. La liste serait trop longue, mais on y retrouverait par exemple : l’impréparation en temps utiles des documents budgétaires propre à informer les assemblées délibérantes, l’absence de budgétisation de certaines charges qui sont autant d’agissements constitutifs de fautes de gestions susceptibles de constituer des infractions financières au sens de l’article L. 313-4 du Code des Juridictions Financières (CJF). Appliqué aux ministres, ce raisonnement, pourrait donner plus de consistance au principe de sincérité budgétaire et conduire à sa juridictionnalisation dans un objectif de bonne gestion des deniers publics qui constitue un principe constitutionnel, lui aussi largement vidé de sa substance[54]. L’absence d’effectivité de principes constitutionnels financiers pourtant porteurs d’éléments de confiance dans la démocratie ne nous paraît plus pouvoir se poursuivre à l’heure où les législations de « transparence » gouvernementales se multiplient dans le but de créer un lien de confiance social qui passe nécessairement par les finances publiques[55].

La réforme de 2022 a donc posé les premières pierres d’une évolution de la responsabilité et de la justice financière unique, renouvelée, démocratique et transparente pour les finances publiques. Mais cette logique n’a pas encore été poussée jusqu’à son terme. La communication de la Cour en faveur d’un renouveau de l’action démocratique en matière financière ne peut plus se départir de la notion de responsabilité des ordonnateurs principaux et de déresponsabilisation des acteurs politiques[56].

La responsabilité politique parlementaire n’a pas joué son rôle et laisse en suspens la question cruciale de la confiance financière dans les élus.

Juger financièrement les ministres (au sein de la Cour des comptes, avec un modèle renouvelé de faute de gestion financière) aurait le mérite de créer la justice financière du siècle nouveau en lien avec la plus vieille des vérités de la démocratie : il n’existe de confiance que dans les preuves. Ne reste plus qu’au Gouvernement à oser mettre sur la table un projet de loi financière mettant directement en cause sa propre responsabilité pour rétablir la confiance !

Anne-Charlène BEZZINA,

Maîtresse de conférences en droit public à l’Université de Rouen Normandie

Laboratoire CUREJ


[1] Art. 20 de la Constitution de 1958.

[2] L’article 10 du décret relatif à la gestion budgétaire et comptable (GBCP) du 7 novembre 2012 dispose que « les ordonnateurs prescrivent l’exécution des recettes et des dépenses ».

[3] G. Glénard, « Chapitre II. La question de la responsabilité de l’exécutif », in L’exécutif et la Constitution de 1791, PUF, 2010, p. 427.

[4] Art. 5 de la Constitution de 1791.

[5] Art. 76 de la Constitution de l’an III.

[6] S. Flizot, « Aux origines de la loi du 16 septembre 1807 créant la Cour des comptes : le contrôle des comptes publics de 1790 à 1807», in F. Descamps, L. Tallineau, Ph. Bezes et S. Kott (dir.), L’invention de la gestion des finances publiques, Institut de la gestion publique et du développement économique, 2013, p. 129-158.

[7] Sieyès écrit en 1789, « Le plan de cet écrit est assez simple. Nous avons trois questions à nous faire. 1° Qu’est-ce que le Tiers Etat ? — TOUT. 2° Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique ? — RIEN. 3° Que demande-t-il ? — À ÊTRE QUELQUECHOSE », E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le Tiers Etat, Flammarion, 1988, p. 1.

[8] Séance de la Constituante du 25 mai 1791.

[9] Art. 6 de la DDHC de 1789.

[10] Art. 2 de la DDHC de 1789.

[11] Art. 14 de la DDHC de 1789.

[12] Il suffit d’en croire le jeu original de la responsabilité politique des ministres et du Roi dans la Constitution de l’an I pour comprendre cette logique de rendre compte par l’action politique et uniquement par elle.

[13] G. Mignot, « Le contrôle externe des finances publiques en France : à propos de quelques défis actuels », Les Petites Affiches, 17 sept. 1997, n° 112, p. 7

[14] Procès-verbal d’installation de la Cour des comptes du 4 mars 1815.

[15] Loi relative à l’organisation de la Cour des Comptes du 16 septembre 1807.

[16] Loi organique n°2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances

[17] cf. en ce sens, la motion ayant conduit à la destitution du Gouvernement Rajoy en Espagne, A. Sfez, « Espagne : la motion de censure (peu) constructive qui a porté Pedro Sánchez au pouvoir », Blog Jus Politicum, 15 juin 2018.

[18] Par ex. la loi n°54-809 du 14 août 1954 habilite le Gouvernement de Pierre Mendès France à établir un programme d’équilibre financier, d’expansion économique et de progrès social par décrets pris en Conseil des ministres. La loi n°56-258 du 16 mars 1956 autorise le Gouvernement de Guy Mollet à mettre en œuvre par décrets un programme d’expansion économique, de progrès social et de réforme administrative en Algérie.

[19] Cf. en ce sens, L. Audouy, « La révision de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution à l’aune de la pratique», RFDC, 2016, n°107, p. 21 ; l’auteur démontre que l’article 49 alinéa 3 est confiné au domaine budgétaire, ce qui est tout à fait conforme à la pratique de l’article depuis l’origine de la Ve République.

[20] Le Conseil constitutionnel n’a pas donné corps à l’argument des parlementaires dénonçant le trop grand nombre de recours à l’article 49 alinéa 3 privant l’article 14 de la DDHC de 1789 de son sens, CC n° 2022-847 DC du 29 déc. 2022.

[21] La pratique a été poursuivie sous l’Empire, cf. la Lettre de Napoléon à Barbé Marbois du 24 frimaire an XIV (15 novembre 1805).

[22] Loi du 22 août 1922 relative à l’organisation du contrôle des dépenses engagées.

[23] JORF n° 0229 du 26 sept., p. 9461 ; l’épithète « financière » a été rajoutée au nom de la Cour par l’art. 1er de la loi n° 62-778 du 31 juil. 1963 de finances rectificatives pour 1963 (JORF n° 0180 du 2 août 1963, p. 7157).

[24] Comm. CC n°2014-423 QPC du 24 oct. 2014.

[25] Cf par ex. S. Flizot, « La genèse de la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l’égard de l’État et de diverses collectivités », Gestion et fin. pub., 2009, n° 6, p. 498-502 ; G. Vedel, « La responsabilité des administrateurs devant la Cour de discipline budgétaire », Rev. sc. légis. fin., 1949, vol. 41, p. 115-133, spéc. p. 133.

[26] Loi n°48-1484 du 25 sept. 1948 tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l’égard de l’Etat et de diverses collectivités et portant création d’une Cour de discipline budgétaire et financière.

[27] La Cour de discipline budgétaire et financière a été mise en place par la loi du 25 sept. 1948, afin de permettre la répression des manquements portés aux règles de gestion des finances publiques.

[28] Ce principe est codifié à l’article L. 314-18 du Code des juridictions financières – devenu à compter du 1er mai 2017 l’article L. 314-15 –, prévoyait ainsi que « Les poursuites devant la Cour ne font pas obstacle à l’exercice de l’action pénale et de l’action disciplinaire ».

[29] Anne Iljic, reconnaît « que la mise en jeu de leur responsabilité constituait une préoccupation importante sous les régimes antérieurs », A. Iljic « Réformer la Cour de discipline budgétaire et financière », Les Cahiers de la fonction publique,2016, n° 365, p. 30.

[30] B. Poujade, « La responsabilité des ordonnateurs en droit public financier : état des lieux », AJDA, 2005, p. 703-708 ; citons également Michel Lascombe et Xavier Vandendriessche qui qualifient la CDBF de « curieuse juridiction » in M. Lascombe et X. Vandendriessche « Chronique de jurisprudence financière. La Cour de discipline budgétaire et financière », Rev. Trésor, 2004, n°1, p. 37.

[31] Est justiciable de la CDBF, en application de l’article L. 312-1 du CJF, toute personne appartenant au cabinet d’un membre du Gouvernement, tout fonctionnaire ou agent civil ou militaire de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics ainsi que des groupements de collectivités territoriales, et tout représentant, administrateur ou agent des autres organismes qui sont soumis soit au contrôle de la Cour des comptes, soit au contrôle d’une chambre régionale ou territoriale des comptes. Sont également justiciables de la CDBF tous ceux qui exercent, en fait, les fonctions des personnes désignées ci-dessus. À l’inverse, ne le sont pas, sauf exception, les ministres ainsi que les élus locaux (al. 2).

[32] F. J. Fabre, précise que « l’appréciation de leur responsabilité dans l’exécution des recettes et des dépenses était difficilement dissociable de l’appréciation de leur politique », in « La Cour de discipline budgétaire et financière », La Revue administrative 1970, n° 136, p. 432.

[33]Cf. par ex. le propos de Malouet en 1791 : «lorsque la négligence était de l’administrateur, il ne manquait jamais d’y pourvoir par un ordre du roi », Opinion de Malouet sur la comptabilité ou la reddition et leur jugement, séance du 7 septembre 1791, Imprimerie nationale, Paris, 1791, p. 6.


[34] cf. par ex. N. Groper, Responsabilité des gestionnaires publics devant le juge financier, Dalloz, coll. « Dalloz Référence », 2009, p. 28.

[35] Le décret GBCP précise que les ordonnateurs ne sont pas inaccessibles à la sanction puisqu’ils « encourent une responsabilité dans les conditions fixées par la loi » (Décret n° 2012-1246, op. cit., art. 12 (art. 17 pour la responsabilité du comptable public). En ce sens, le Conseil constitutionnel estime que cela suffit à remplir le dogme de l’article 15 de la déclaration de 1789 en ce que les ordonnateurs rendent bien des comptes, Cf. en ce sens, CC, décision n°2006-545 DC du 28 déc. 2006, Loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social.

[36] CC, Décision n° 2014-423 QPC du 24 octobre 2014 M. Stéphane R. et autres.

[37] Cour de discipline budgétaire et financière, Rapport au Président de la République, 2023, https://www.ccomptes.fr/fr/documents/63641

[38] CC n°2016-599 QPC du 2 déc. 2016.

[39] Le ministre est une autorité administrative comme une autre puisqu’il dirige les administrations en vertu de la Constitution de 1958.

[40] Cf. S. Damarey, « La réforme de la responsabilité financière des gestionnaires publics constitue une régression majeure », Le Monde, 29 avril 2022 ; sur les différents volets de cette affaire, voir O. Beaud, « La condamnation de Christine Lagarde par la Cour de justice (I) », Blog Jus Politicum, 20 déc. 2016.

[41] S. Damarey, « La réforme de la responsabilité financière des gestionnaires publics constitue une régression majeure », art. cit.

[42] Loi n°2013-907 du 11 oct. 2013 relative à la transparence de la vie publique.

[43] Cf. pour la question de la confiance démocratique, C. Hirsch et N. Groper « La responsabilité des gestionnaires publics », Archives de philosophie du droit,2021, t. 63, p. 165-183.

[44] Victor Marcé précise, par exemple, que « La responsabilité pécuniaire des ministres à l’égard des dépenses non autorisées qu’ils ont pu effectuer […] ne saurait entraîner des conséquences pratiques, faute de juridiction compétente pour connaître des infractions budgétaires », in L. Say et J. Chailley-Bert (dir.), Nouveau dictionnaire d’économie politique, Guillaumin & Cie,1891, t. I, p. 576.

[45] Cf. les propos du député Pradon : « Il faut qu’ici comme là tout acte engage la responsabilité de celui qui le commet. Il faut qu’ici comme là l’imprudent ou le coupable se trouve placé sous la rigueur de la loi », .JO. 24 juill. 1888, Annexe de la Chambre, p. 667.

[46] De Montcloux, De la comptabilité publique en France, 1840, cité par R. Stourm, Le budget, Guillaumin & Cie, 1896, p. 579.

[47]  Art. 4 § 7 : « Il y a prévarication de la part d’un ministre […] s’il intervertit ou dépasse un crédit budgétaire ou dépasse un crédit législatif »

[48] Sur l’ensemble de ces questions, cf. S. Kott, «Le Parlement à la conquête du contrôle financier », in Le contrôle des dépenses engagées. Evolutions d’une fonction, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2004, p. 27-69.

[49] S. Damarey, « La réforme de la responsabilité financière des gestionnaires publics constitue une régression majeure », art. cit.

[50] « Toute infraction commise par l’Exécutif devait trouver un responsable, au premier chef le ministre, archétype de l’agent faillible (…). Cette inclination imprégnée de connotations pénalistes sera celle d’une majorité de Constituants qui jamais sur le principe ne fléchira ».

[51] Les élus locaux sont en réalité responsables devant la CDBF dans quelques cas restreints (art. L. 312-2 du CJF) : lorsqu’ils ont émis un ordre de réquisition ayant procuré à autrui un avantage injustifié au préjudice de la collectivité (art. L. 313-6 du CJF) ; lorsqu’ils sont à l’origine d’une condamnation à l’astreinte de leur collectivité du fait de l’inexécution totale ou partielle, ou de l’exécution tardive, d’une décision de justice (art. L. 313-725 et L. 313-12 du CJF) ; et enfin, lorsqu’ils commettent des irrégularités

[52] Loi n°2013-907 du 11 oct. 2013 relative à la transparence de la vie publique et Décret n°2017-1063 du 18 mai 2017 relatif aux cabinets ministériels.

[53] La faute lourde a été abandonnée, ce qui signe une grande évolution de la jurisprudence relative à la faute de l’administration en matière de deniers publics, CE, sect., M. Krupa, 21 mars 2011, n°306225.

[54] Pour l’une des rares applications contentieuses de cet objectif de valeur constitutionnelle, Cf. par ex. CC n°2016-736 DC du 4 août 2016.

[55] Cf. S. Damarey, « La réforme de la responsabilité financière des gestionnaires publics constitue une régression majeure », art. cit. ; S. Damarey Billet « Le régime de responsabilité financière des gestionnaires publics : un projet vidé de sa substance », Dalloz actu étudiant, 4 oct. 2021 ; S. Damarey, « Réforme de la responsabilité des gestionnaires publics : les dés sont jetés », AJDA, 2022, p. 920.

[56] J.-L. Nadal, Renouer la confiance publique. Rapport au Président de la République sur l’exemplarité des responsables publics, La documentation française, 2015, p. 119 et s. ; E. Deschamps, « L’État exemplaire : slogan ou nouveau principe ? », RFAP, 2012, n° 143, p. 829-845.