Pierre-Antoine LALANDE.
S’il n’a pas annoncé avec certitude la tenue d’un référendum lors de son entretien télévisuel du 13 mai dernier, le président de la République a néanmoins confirmé sa volonté de renouer avec cet outil inutilisé depuis une vingtaine d’années. Les hésitations du chef de l’État révèlent bien sûr les doutes relatifs aux fonctions institutionnelles projetées sur le référendum, mais elles s’expliquent aussi par une incertitude du cadre juridique du recours à l’outil.
Emmanuel Macron a d’abord passé en revue plusieurs enjeux sensibles que certains voudraient voir figurer au cœur du prochain référendum. Il s’est réservé la possibilité d’organiser un référendum sur la « fin de vie », mais seulement dans l’hypothèse où la procédure parlementaire s’enliserait. Il a en revanche écarté la tenue d’un référendum relatif à l’immigration, ainsi que sur la réforme des retraites. Si ce second thème est exclu pour des raisons proprement politiques, celui de l’immigration est écarté au nom d’une certaine interprétation de la Constitution. À ce propos, le chef de l’État « ne voit pas le sujet qui tomberait dans le champ de l’article 11 et qui permettrait d’être efficace ». De même, Emmanuel Macron a rappelé les difficultés juridiques du projet de référendum suggéré par le Premier ministre sur la réforme de l’État et de ses dépenses[1]. Sans fermer la porte à l’ensemble des sujets évoqués par François Bayrou, le président de la République a souligné qu’aucun référendum ne pouvait être organisé sur la fiscalité ou le budget, rappelant par la même occasion son rôle de gardien de la Constitution. Cette interprétation stricte contraste pourtant avec celle, plus souple, retenue par le chef de l’État sur la fin de vie.
Rappelons, en effet, que l’article 11 permet au président de la République, « sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel », de soumettre un « projet de loi » au référendum sur trois types de sujets. Le premier est « l’organisation des pouvoirs publics », notion dont le potentiel sulfureux fut révélé à l’automne 1962, et dont personne ne sait dresser précisément les contours. Le deuxième, « les réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation » et « les services publics qui y concourent », fut ajouté par les révisions constitutionnelles du 4 août 1995 et du 23 juillet 2008[2]. Le troisième sujet est, enfin, la « ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions ». Or, si l’on voit mal comment rattacher le thème de la « fin de vie » à l’une de ces dimensions, il ne serait pas inenvisageable d’inclure certains enjeux relatifs à la fiscalité et à l’immigration à la « politique économique et sociale », voire à « l’organisation des pouvoirs publics ».
Ces interprétations du texte constitutionnel sont contestables, mais elles traduisent également une constante du cadre juridique du référendum sous la Ve République : le monopole d’interprétation du président de la République, assimilable dans certains cas à un véritable interprète authentique. Le chef de l’État est non seulement le maître du déclenchement du référendum législatif – lequel est simplement proposé par le Premier ministre –, mais il est aussi libre de livrer sa propre interprétation du cadre juridique offert par la Constitution, qui ne pourra être juridiquement contredite par aucun organe si elle conduit à un non-recours au référendum. Plus contraignant pour le président de la République, l’article 89 de la Constitution ne permet, pour sa part, d’organiser un référendum de révision de la Constitution qu’après un vote dans les mêmes termes par les deux assemblées[3].
Afin de signifier sa maîtrise de l’outil référendaire, Emmanuel Macron a suggéré un autre projet, sur lequel nous souhaiterions désormais concentrer notre analyse. Confirmant sa volonté de solliciter les Français, exprimée lors de ses vœux du 31 décembre 2024, le chef de l’État a, en effet, affirmé qu’il souhaitait organiser « une consultation multiple, c’est-à-dire plusieurs référendums en même temps, dans les mois qui viennent ». S’il n’existe aucune certitude sur la tenue d’une telle consultation, dont le président de la République semble stratégiquement réserver les modalités précises, l’idée d’un enrichissement de la pratique référendaire mérite d’être prise au sérieux, notamment parce qu’elle n’est pas nouvelle. Le chef de l’État avait réuni les chefs des partis représentés au Parlement à la fin de l’été 2023, en inscrivant le référendum au cœur des propositions pour déconstruire les contraintes de la majorité relative d’alors. Concomitamment, Olivier Véran, alors porte-parole du Gouvernement, avait évoqué la tenue d’un « préférendum » ou d’un « pré-référendum »[4]. Ce nouveau type de référendum consultatif aurait eu pour mérite, selon ses concepteurs, d’offrir aux citoyens « plusieurs choix » sur de multiples sujets[5]. Il s’agissait alors non seulement de multiplier les questions posées, mais aussi de diversifier les réponses possibles à chacune de ces questions afin d’exprimer des préférences. Si les projets présidentiels actuels ne semblent pas reprendre l’idée de proposer au corps électoral d’exprimer de telles préférences, ils présentent pour point commun de complexifier le choix proposé par référendum.
Le président de la République semble plus précisément conforter l’idée de poser plusieurs questions, le même jour, au corps électoral. Une telle volonté se heurte cependant à de potentiels obstacles, appelant un cadre juridique aux contours incertains (I), qui donnerait lieu à une pratique aux résultats eux-mêmes aléatoires (II).
I. Un cadre juridique aux contours incertains
Les velléités présidentielles se heurtent à un obstacle de taille : en l’état actuel du droit français, un référendum national ne peut être organisé que pour la ratification d’un « projet de loi », et obéir à des conditions très précises issues du texte de la Constitution et de la jurisprudence constitutionnelle. Ce cadre juridique présente deux obstacles : le champ du référendum ne permet pas, a priori, de soumettre des questions de rang législatif sur certains sujets importants, et il restreint également la multiplication des questions posées. Le président de la République peut décider de demeurer dans le cadre juridique de l’article 11, mais devrait alors préciser certaines données juridiques nécessaires à l’organisation du scrutin (A). Il peut également choisir de construire un nouveau cadre juridique ad hoc, qui susciterait alors d’autres interrogations sérieuses(B).
A. De lege lata
Selon le droit positif, plusieurs référendums peuvent bien être organisés le même jour[6], mais ils doivent être distincts : chaque scrutin doit porter sur la ratification d’un projet de loi précis et faire l’objet d’un vote dans une urne autonome. Pour cette raison même, un référendum ne peut distinguer plusieurs questions ou plusieurs réponses puisqu’il doit conduire à accepter la ratification du texte – par le vote « Oui » – ou à la refuser – par le vote « Non ».
Si le président de la République choisissait de respecter ces conditions, il faudrait encore qu’il inscrive son projet dans le champ de l’article 11. Dans l’hypothèse où Emmanuel Macron organiserait ainsi un référendum au terme d’une lecture extensive du champ de l’article 11, il se heurterait à une possible censure du Conseil constitutionnel sur le fondement de sa jurisprudence Hauchemaille[7]. Celle-ci permet, en effet, de contrôler les décrets préparatoires des référendums et notamment le décret de convocation des électeurs[8], lequel formule la question posée et joint le projet de loi soumis au référendum.
On peut se demander si le Conseil constitutionnel ferait preuve de la même sévérité vis-à-vis d’un projet présidentiel qu’à l’égard des propositions de loi examinées dans le cadre de sa jurisprudence « RIP »[9], du nom du référendum d’initiative partagée inséré au troisième alinéa de l’article 11 par la révision de 2008[10]. Ce questionnement met le doigt sur toutes les incertitudes du contrôle juridictionnel du référendum sous la Ve République. La jurisprudence Hauchemaille, élaborée de façon pour le moins volontariste et critiquable par le Conseil, institue-t-elle un contrôle plein et entier ou doit-elle seulement conduire à censurer des irrégularités manifestes ? Autrement dit, existe-t-il une jurisprudence commune du Conseil constitutionnel sur le champ du référendum de l’article 11, valable aussi bien pour l’initiative partagée que pour l’initiative présidentielle ? L’autorité du chef de l’État dans l’usage de l’un de ses pouvoirs propres[11] pourrait évidemment conduire le juge constitutionnel à se montrer pusillanime.
La question est d’autant plus prégnante que les thèmes évoqués par le chef de l’État sont loin d’entrer avec certitude dans le champ de l’article 11. Tel est le cas, notamment, de l’accès des jeunes aux réseaux sociaux et de la fin de vie[12], qui semblent plutôt avoir trait à des questions « sociétales » – et non « sociales » au sens où l’entendaient les parlementaires de 1995[13] – et aux libertés publiques[14], ce dernier thème ayant été explicitement exclu lors des débats précédant la révision de 1995, après avoir été envisagé au cours des années 1980.
Cette question du contrôle juridictionnel du référendum ne se limite pas à celle du champ de l’article 11. Le Conseil constitutionnel a développé une jurisprudence sur l’« exigence de loyauté et de clarté de la consultation », d’abord à l’égard des référendums d’autodétermination[15], puis à propos du référendum national par le truchement de la jurisprudence Hauchemaille[16]. Lors de cette extension, le Conseil a, de plus, explicité qu’une telle exigence ne portait pas seulement sur la question posée, mais bien sur l’ensemble de la consultation. Le Conseil pourrait ainsi examiner si les questions multiples posées le même jour portent atteinte à la loyauté et à la clarté de chaque consultation. Une question posée de façon équivoque pourrait bien sûr contrevenir à ces exigences. Mais une censure serait également possible si la multiplicité des questions et des projets de lois soumis au corps électoral se « chevauchaient » de manière inintelligible ou présentaient un degré de complexité trop fort.
Par ailleurs, l’organisation d’un tel référendum dans le cadre de l’article 11 de la Constitution poserait des questions d’organisation concrète, notamment de la campagne qui précède le scrutin[17]. Le droit régissant l’organisation du scrutin et de la campagne était, rappelons-le, exclusivement fixé par décret jusqu’en 2013 et le fut donc ainsi lors du dernier référendum national en date[18]. Seule une loi du 6 décembre 2013[19] a inséré des règles élémentaires au Code électoral. Organiser un nouveau référendum législatif permettrait alors de découvrir l’incomplétude du droit référendaire législatif, et encore jamais appliqué en l’absence de recours au référendum depuis son édiction. Certaines questions fondamentales, notamment quant à la participation des partis politiques à la campagne[20], devraient alors faire l’objet de réponses précises. En particulier, les règles édictées devraient-elles être distinguées pour chaque scrutin ou être conçues pour l’ensemble des scrutins organisés le même jour ? Cette question apparaîtrait d’autant plus fondamentale si la participation à la campagne officielle était indexée sur le soutien au « Oui » ou au « Non », qui pourrait alors varier d’une question à l’autre.
Enfin, si les projets de loi soumis au référendum étaient effectivement adoptés par une majorité de « Oui », ils se trouveraient au cœur du régime juridique erratique du référendum. Potentiellement soumise à un contrôle de conventionnalité[21], la norme référendaire serait en revanche insusceptible de recours devant le Conseil constitutionnel, tant dans le cadre de son contrôle a priori[22]que par voie de QPC[23]. Les critiques adressées à cette jurisprudence ne seraient que décuplées puisque de multiples questions aux conséquences juridiques concrètes[24] échapperaient potentiellement au contrôle de constitutionnalité et ne permettraient pas, ainsi, de répondre juridiquement aux contestations des opposants au « Oui ». Ajoutons que ce régime singulier s’appliquerait aussi bien en cas de victoire écrasante du « Oui » obtenue à l’issue d’une vaste participation, qu’en cas de victoire étriquée obtenue après une participation famélique. La valeur normative du texte adopté par référendum n’est, en effet, nullement indexée sur un quorum, au risque de conférer un régime extraordinaire à un texte pourtant faiblement approuvé.
Les opposants aux projets de loi soumis au référendum pourraient évidemment saisir le Conseil constitutionnel d’une contestation de fond dans le cadre du contrôle des actes préparatoires institué par la jurisprudence Hauchemaille. Le Conseil a, en effet, accepté à demi-mot en 2005 d’examiner un moyen de constitutionnalité de « fond »[25]. Cependant, aucune certitude n’existe, encore une fois, sur l’étendue de ce contrôle. Par ailleurs, on peut estimer que la précision juridique des moyens soulevés est moindre à ce stade, et ne permet pas d’inclure les enjeux d’application de la loi, qui enrichissent pourtant l’argumentation constitutionnelle dans le cadre du contentieux « QPC ».
Enfin, cette singularité du régime juridique du référendum, construit au compte-gouttes depuis 1958 sans jamais être conçu globalement, réapparaîtrait au stade de la modification ultérieure de la norme référendaire. Le Conseil constitutionnel permet, en effet, qu’une loi parlementaire « modifie, complète ou abroge »[26] une loi référendaire, la spécificité normative du référendum ne se prolongeant pas à ce stade. Tout le paradoxe serait donc que seule une modification à la marge du texte adopté par référendum permettrait son contrôle juridictionnel.
Ainsi, le moins que l’on puisse dire est que, même si elle s’efforçait de respecter le cadre juridique actuel du référendum, la pratique renouvelée du chef de l’État susciterait de nombreuses interrogations juridiques susceptibles de complexifier son usage.
B. De lege ferenda
Les ambitions annoncées par le chef de l’État semblent, quoi qu’il en soit, aller potentiellement au-delà du cadre juridique du référendum défini par l’article 11 de la Constitution, tant au regard des sujets évoqués que de la multiplicité des questions projetées. Sorti du carcan juridique imposé par la Constitution permettrait non seulement d’organiser une consultation sur des sujets exclus par l’article 11, mais aussi de poser une multitude de questions potentiellement déliées d’un texte précis, et pouvant appeler des réponses elles-mêmes multiples. Ces consultations rompraient ainsi avec la conception du « référendum » stricto sensu de la Ve République, ce qui explique sans doute certains errements sémantiques[27].
Pour autant, ces innovations ne pourraient que difficilement se déployer sans cadre juridique. Le chef de l’État pourrait certes opter pour une consultation non contraignante sans respecter aucune norme habilitatrice, quitte à l’organiser de manière très informelle, par exemple via internet. La consultation en question serait alors organisée hors du cadre constitutionnel, comme le furent par exemple les Conventions citoyennes. Si la consultation n’était pas décisionnelle, elle ne serait pas, par son objet même du moins, frappée d’inconstitutionnalité. Le risque serait cependant de susciter la défiance du corps électoral, qui y verrait sans doute des risques de manipulation. Surtout, les maires ne pourraient pas être contraints de mettre en place les bureaux de vote dans leurs communes respectives. De même, aucun juge ne serait a priori compétent pour trancher les litiges nés de cette consultation.
L’adoption d’une loi apparaît donc déterminante pour offrir un cadre juridique à ces consultations. Le vote d’une simple loi ordinaire permettrait alors d’enrichir les potentialités de la pratique référendaire à moindres frais, sans passer par la délicate étape de la révision de la constitution, plusieurs fois envisagée pour élargir le champ de l’article 11. Mais on voit bien que l’édiction d’un tel cadre législatif se heurte à deux obstacles, l’un politique et l’autre juridique. D’un point de vue politique, le chef de l’État devrait trouver une majorité au Sénat et à l’Assemblée nationale pour voter un tel projet de loi. Or, une telle entreprise est loin d’être aisée : en l’absence de majorité soutenant l’action du président de la République, pourquoi les parlementaires d’opposition offriraient-ils la possibilité à ce dernier de ne pas être réduit à l’inaction ? La situation serait alors peu ou prou identique à celle dans laquelle s’était déjà retrouvé le Sénat en 1984 et en 2020[28]. D’un point de vue juridique, la loi pourrait également être déférée au Conseil constitutionnel et faire l’objet d’une censure, partielle ou totale.
Dans l’hypothèse où une telle loi parviendrait à offrir un cadre juridique à ces consultations, la question de son contenu précis se poserait également. Elle devrait construire un régime ad hoc propre à ces nouvelles consultations, toutes les garanties construites depuis 1958 se trouvant alors réinitialisées. On peut se demander s’il serait renvoyé au droit électoral commun, et même au droit « référendaire » commun édicté en 2013, ou si les consultations ne bénéficieraient pas d’un droit sur mesure. Telle est la première critique fondamentale que l’on pourrait opposer à ce cadre juridique « aconstitutionnel », produisant une redoutable indétermination juridique.
Si l’on se penche ensuite sur les modalités d’édiction de ce cadre nouveau, on peut imaginer deux cas de figure. Soit le texte voté habiliterait simplement le chef de l’État ou le Gouvernement à organiser un type de consultation non prévu par la Constitution, comme le fit le Parlement en 2016 pour permettre le référendum sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes[29]. Soit le texte organiserait lui-même directement la consultation souhaitée par le chef de l’État, comme ce fut le cas pour certains référendums d’autodétermination organisés sous la Ve République[30].
Dans les deux cas, le Conseil constitutionnel pourrait appliquer sa jurisprudence précitée sur l’« exigence de loyauté et de clarté de la consultation », dans le cadre de son contrôle a priori de la loi prévu par l’article 61 alinéa 2. Et il n’est pas certain qu’il permette toutes les innovations au cœur des projets présidentiels. Dans l’hypothèse où la loi votée ne prévoirait que le cadre juridique de la consultation et non la consultation elle-même, le Conseil pourrait également être conduit à exercer un contrôle des décrets organisant le scrutin. Il faudrait alors que cette même loi prévoie une telle compétence de l’institution, ou encore qu’elle se reconnaisse compétente par un rattachement volontariste à la mission que lui confère l’article 60 de la Constitution.
Ces aléas, qui contraignent l’observateur à la spéculation, illustrent toute l’incertitude du cadre juridique du référendum sous la Ve République, laquelle ne se trouve qu’accentuée par les velléités présidentielles. Il n’est pas certain, au surplus, que cette incertitude soit compensée par une certitude des bénéfices institutionnels d’un référendum ainsi renouvelé.
II. Un cadre juridique aux conséquences incertaines
Quel qu’il soit, le cadre juridique privilégié par le pouvoir exécutif ne sera qu’un instrument permettant de poursuivre certaines finalités institutionnelles. S’il permet bien à première vue de tourner le dos à certains vices du référendum tout en mobilisant certaines de ses potentialités (A), il n’est pas certain que ce potentiel parvienne à être exploité efficacement par le président de la République au regard de la démarche qu’il semble entreprendre (B).
A. Des atouts institutionnels recherchés
Si leur construction semble délicate, les potentiels cadres juridiques renouvelés que semblent appeler les projets présidentiels présentent, à première vue, des atouts institutionnels certains. Ils permettraient, notamment, de pallier certains défauts fréquemment imputés à l’outil référendaire. La multiplicité des questions sur des thèmes différents permettrait d’abord d’éviter soigneusement la dimension « plébiscitaire » ou « personnalisée » du référendum. Ne pas concentrer le référendum dans une seule question et un seul projet de loi permettrait plus généralement d’éviter le glissement d’enjeu, en incitant les électeurs à répondre avec précision à chaque question. La précision de la question devrait ici appeler la précision de la réponse.
La multiplicité des questions sur des thèmes similaires permettrait également de tourner le dos au caractère binaire du référendum, dont certains tirent un manichéisme archaïque. Il serait ainsi possible, pour chaque citoyen, de nuancer ses choix. Alors que le corps électoral du printemps 1969 devait répondre « Oui » ou « Non » à une question portant tout à la fois sur la réforme des régions et celle du Sénat, le corps électoral pourrait désormais se prononcer indépendamment sur chaque thème identifié par le pouvoir exécutif. Par ailleurs, en l’absence de personnalisation revendiquée du référendum, les électeurs pourraient distinguer leur confiance – ou leur défiance – à l’égard du chef de l’État et leur approbation de chaque projet de loi.
Le renouvellement des modalités de la pratique référendaire est sans doute indispensable à l’acceptation contemporaine du référendum, tout à la fois redouté par les gouvernants craignant un « plébiscite négatif » et rejeté par certains théoriciens de l’innovation démocratique[31]. Le fait d’éviter toute personnalisation de la consultation et de complexifier le choix offert au corps électoral présente pour atout d’accentuer la rationalité de l’expression démocratique. Cette accentuation pourrait se déployer sans renoncer au référendum et à sa fonction classique : permettre au corps électoral de décider et conférer ainsi une légitimité à certaines réformes et, plus globalement, à l’action des pouvoirs publics.
Quitte à explorer cette voie, il serait toutefois utile d’aborder les deux grandes questions contemporaines de la pratique référendaire : le changement de son initiateur et sa conciliation avec les instruments délibératifs de la démocratie. À cet égard, on peut se demander pourquoi le chef de l’État ne cherche pas plus directement à associer en amont les Conventions citoyennes, dont il multiplie les expérimentations, avec la sanction référendaire en aval. Conférer à une instance délibérative le soin d’élaborer un projet de loi dont la soumission au référendum serait d’emblée assumée, permettrait de joindre directement les composantes rationnelle et décisionnelle de la démocratie. C’était, du reste, ce que proposaient les concepteurs initiaux du préférendum[32],un temps approximativement repris par le pouvoir exécutif en 2023. D’autres projets, déjà expérimentés à l’étranger et analysés par une littérature nourrie, comme l’ajout de mini-publics délibératifs[33] en amont du vote, pourraient également être envisagés. De plus, ces pratiques pourraient tout à fait voir le jour, dès aujourd’hui, sans opérer une quelconque modification du cadre juridique français du référendum. Il suffirait, pour le chef de l’État, de s’engager à soumettre les propositions formalisées par une Convention citoyenne ou un mini-public délibératif dans un projet de loi soumis au référendum sur le fondement de l’article 11.
À défaut de piocher pleinement dans les théories de l’innovation démocratique, le projet du président de la République pourrait également accentuer la composante rationnelle du référendum en diversifiant, comme le suggérait Olivier Véran en 2023, les réponses proposées au corps électoral. Si l’agencement des questions est bien conçu, une telle diversification pourrait s’avérer mobilisatrice. Cette diversification pourrait également prendre la forme de choix conditionnés, la réponse à une question dépendant alors de celle apportée à une question précédente. Une telle méthode n’est pas, au demeurant, inconnue de l’histoire constitutionnelle française. Le 21 octobre 1945, le corps électoral était ainsi interrogé aux fins de savoir s’il approuvait un projet de Constitution provisoire, la réponse à cette seconde question n’était comptabilisée que dans l’hypothèse où la réponse à la question de savoir si l’Assemblée nationale devait être constituante s’avérait positive[34].
B. Des bénéfices institutionnels aléatoires
Le propre du référendum est que son résultat ne dépend pas tant de sa nature intrinsèque que de la façon dont il est perçu par le corps électoral. Ainsi, le prochain référendum aura beau être méticuleusement construit, il sera sans doute considéré comme un échec si la participation est trop faible ou si une majorité de « Non » semble avoir résulté d’un glissement d’enjeu.
Or, on peut s’interroger sur la perception d’un tel référendum par le corps électoral, notamment au regard du décalage entre l’initiative présidentielle qui le précède et les vertus démocratiques que l’on semble lui prêter. N’est-ce pas contradictoire, pour le chef de l’État, d’utiliser le référendum comme un « coup politique » et de tout faire pour qu’il ne soit pas présenté comme tel ? Il semble y avoir un certain décalage entre l’attitude très « verticale » du président de la République, qui semble conserver le référendum comme son ultime outil pour ne pas être réduit à l’inaction, et la volonté d’innovation démocratique plus « horizontale » qu’il semble prôner.
En l’absence de refonte profonde de l’outil référendaire, il risque d’exister un hiatus entre la conservation des bénéfices de l’initiative présidentielle et le dépassement de ses contraintes. Le premier risque majeur est la démobilisation du corps électoral, qui peut non seulement suspecter une manœuvre, mais aussi être « noyé dans des débats contradictoires sur des sujets différents »[35]. Or, la participation est bien l’un des talons d’Achille du référendum sous la Ve République. Par trois fois, la participation à un référendum national fut jugée décevante – 1972, 1988, 2000 – car inférieure aux standards électoraux d’alors. Les causes de cette déception furent diverses : tantôt l’appel d’un parti d’opposition à l’abstention – le Partis socialiste en 1972 –, tantôt le caractère peu mobilisateur du sujet – 1988 – ou de la campagne – 2000. Les projets d’Emmanuel Macron risquent précisément d’être confrontés à ces différents écueils. S’inscrivant à la suite du refus d’organiser des référendums sur des sujets très débattus – les retraites, l’immigration, le budget –, une consultation sur un autre sujet risque d’être considérée comme insincère et ne pas mobiliser. Corrélativement, les partis d’opposition risquent d’utiliser cet argument comme prétexte pour appeler à l’abstention. Or, si une faible participation n’est pas nécessairement un problème en soi, elle le devient si le chef de l’État recherche dans le référendum une légitimation substantielle, fut-elle déliée de sa personne. Notons qu’au risque d’abstention stricto sensu s’ajoute celui des bulletins nuls, mécaniquement plus fort si le choix proposé au corps électoral est complexe.
Les conséquences politiques du référendum se présenteraient ensuite différemment si le référendum était consultatif ou décisionnel. Quelles seraient, d’abord, les suites d’un référendum consultatif ? Il n’est pas impossible qu’une question ayant recueilli une majorité de votes favorables lors d’un référendum consultatif ne soit pas en mesure d’être « concrétisée » juridiquement. Car, à supposer même que les parlementaires se « plient » à la volonté exprimée par une majorité d’électeurs, cette volonté pourrait toujours faire l’objet d’interprétations diverses, et donc de propositions de concrétisation divergentes. L’opposition entre gouvernants et gouvernés réapparaitrait avec d’autant plus de force, et achèverait de décrédibiliser le référendum. Si ces aléas ne sont pas nécessaires rédhibitoires, ils attirent l’attention sur l’un des atouts du référendum décisionnel « classique » : permettre au corps électoral de trancher avec netteté.
D’autres problèmes se présenteraient si plusieurs référendums décisionnels étaient organisés sur le fondement de l’article 11. On peut d’abord se demander si le législateur jugerait opportun d’user de son droit de libre modification de la norme référendaire reconnu par le Conseil constitutionnel si un projet de loi était effectivement ratifié. Symétriquement, que faire si une courte majorité de « Non » l’emporte sur l’une des questions posées, d’autant plus si la participation est faible ? Faudrait-il dès lors renoncer à toute forme de projet de réforme sur le thème rejeté par le corps électoral ? Si cette solution n’est guère satisfaisante pour les différents thèmes en question, la solution inverse pourrait alimenter le sentiment que le vote populaire n’est pas respecté.
On le voit bien, le risque est que la volonté exprimée par le corps électoral soit franchement ignorée, ou apparaisse simplement impossible à mettre en œuvre. Or, cela risque de rappeler de douloureuses expériences de la Ve République. Le plus emblématique est sans doute le référendum négatif du 29 avril 2005, qui n’a pas empêché la ratification parlementaire d’un traité matériellement très proche deux ans plus tard. Cet exemple est d’autant plus significatif qu’il s’agissait bien d’un référendum national organisé dans le cadre de l’article 11. Mais on peut penser, également, au référendum précité sur Notre-Dame-des-Landes en 2016, qui n’a pas non plus été suivi d’effets[36]. Ce dernier référendum pourrait certes être distingué en ce qu’il n’était que consultatif, mais ses suites traduisent bien une tendance à ne pas se saisir pleinement de la volonté majoritaire exprimée dans le cadre d’un scrutin[37].
Tout ceci témoigne du fait que l’enrichissement de la pratique référendaire n’est pas une chose aisée, et ne peut s’affranchir des difficultés globales posées par la question du référendum. Ces difficultés ne doivent nullement, à nos yeux, conduire à renoncer à cet outil, mais à soigneusement concevoir son encadrement et sa mise en œuvre juridique. Il ne faut pas oublier, à cet égard, que le glissement d’un référendum classique vers des consultations informelles a parfois été orchestré par des pouvoirs autoritaires comme celui de Viktor Orban en Hongrie[38]. Le fait de créer des méthodes innovantes de consultation n’est pas un gage de « démocratisation » de l’outil référendaire. On ne saurait évidemment comparer les velléités du président de la République à celles de M. Orban. Mais sans utiliser les leviers de l’illibéralisme, une telle pratique référendaire risque simplement d’être fort décevante.
Afin d’éviter deux grands écueils du référendum – l’autoritarisme, d’une part, et la déception, d’autre part – une refonte d’ampleur de son statut et de son cadre juridique semble s’imposer.
Pierre-Antoine LALANDE.
Docteur en droit et ATER – Université Paris-Panthéon-Assas
[1] V. « Budget, dette, impôts : François Bayrou veut un référendum », Le journal du dimanche, 3 mai 2025.
[2] Cette deuxième révision a simplement ajouté la référence à la politique « environnementale » de la nation.
[3] Rappelons que le référendum est la règle pour ratifier la révision après un vote identique par les deux assemblées. Cette règle peut être contournée, mais uniquement dans le cas d’un « projet de révision » – et non d’une « proposition » de révision –, « lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès ; dans ce cas, le projet de révision n’est approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés » (art. 89 al. 3). Un référendum de révision semble a priori exclu par le chef de l’État, sans doute parce qu’il peinerait à obtenir une majorité à l’Assemblée et au Sénat.
[4] Les projets alors mis en valeur par le Gouvernement n’étaient pas exempts d’ambiguïtés. L’idée de « préférendum » faisait écho à une forme d’innovation démocratique, notamment défendue par David Van Reybrouck (v. « Le « préférendum », arme ultime de décision citoyenne », Le Monde, 21 octobre 2021). Selon ce modèle, un référendum pourrait impliquer un processus délibératif en amont et permettre, en aval, au corps électoral d’exprimer des préférences sur certains thèmes. Cette proposition rejoint celles du collectif « Mieux voter », notamment fondées sur des méthodes de vote plus consensuelles (v. par ex. « Mon idée pour la France : « Un « préférendum » plutôt qu’un référendum », Le Monde, 4 février 2019). En mentionnant le « préférendum », Olivier Véran n’avait toutefois pas exploité tout ce potentiel d’innovation, et avait ajouté la notion de « pré-référendum », suggérant simplement une consultation plus sommaire en amont de la prise de décision.
[5] V. M. Revon, P. Taillon, « Le « préférendum » : entre nouveauté démocratique et référendum déguisé », Le club des juristes, 12 septembre 2023.
[6] On remarquera d’ailleurs que cette éventualité est explicitement prévue au second alinéa de l’article L. 558-45 du Code électoral : « Lorsque plusieurs référendums sont organisés le même jour, il est mis à disposition des électeurs un bulletin de vote imprimé sur papier blanc permettant de répondre à chaque question posée par la réponse « oui » ou « non ».
[7] CC, n° 2000-21 REF, 25 juillet 2000, Hauchemaille.
[8] Le considérant de principe de cette jurisprudence énonce précisément « qu’en vertu de la mission générale de contrôle de la régularité des opérations référendaires qui lui est conférée par l’article 60 de la Constitution, il appartient au Conseil constitutionnel de statuer sur les requêtes mettant en cause la régularité d’opérations à venir dans les cas où l’irrecevabilité qui serait opposée à ces requêtes risquerait de compromettre gravement l’efficacité de son contrôle des opérations référendaires, vicierait le déroulement général du vote ou porterait atteinte au fonctionnement normal des pouvoirs publics ».
[9] Jurisprudence construite dans le cadre du contrôle obligatoire institué par l’article 11 alinéa 4 de la Constitution. Ce contrôle se situe au cœur de la procédure du RIP, après la signature de l’initiative par un cinquième des membres du Parlement, mais avant la phase de récolte du soutien d’un dixième du corps électoral.
[10] Lequel dispose qu’« un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa peut être organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ». Le champ du référendum d’initiative partagée est donc le même que celui de l’initiative présidentielle.
[11] En dépit de la nécessaire proposition du Premier ministre, l’article 11 est bien considéré comme un pouvoir propre du président de la République dans la mesure où il est dispensé de contreseing en vertu de l’article 19 de la Constitution.
[12] Deux thèmes évoqués par Emmanuel Macron lors de son entretien du 13 mai.
[13] En 1995, le terme « sociale » a été ajouté de manière conjointe au terme « économique », les deux termes ayant été conçus pour former un bloc homogène.
[14] En ce sens, v. B. Jérôme, « La possibilité d’un référendum sur la fin de vie, évoquée par Emmanuel Macron, laisse les constitutionnalistes sceptiques », Le Monde, 14 mai 2025.
[15] CC, n° 86-226 DC, 2 juin 1987, Loi organisant la consultation des populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie et dépendances prévue par l’alinéa premier de la loi n° 86-844 du 17 juillet 1986 relative à la Nouvelle-Calédonie ; CC, n° 2000-428 DC, 4 mai 2000, Loi organisant une consultation de la population de Mayotte.
[16] CC, n° 2005-31 REF, 24 mars 2005, Hauchemaille et Meyet.
[17] Sur ces questions, v. Q. Girault, « La campagne référendaire ou l’impensé du droit électoral », RFDC, n° 123, 2020, pp. 565-585.
[18] Ainsi, en 2005, trois décrets avaient été édictés. V. Décret n° 2005-218 du 9 mars 2005 décidant de soumettre un projet de loi au référendum, JORF, 10 mars 2005, p. 3984 ; Décret n° 2005-237 du 17 mars 2005 portant organisation du référendum, JORF, 18 mars 2005, p. 4571 ; Décret n° 2005-238 du 17 mars 2005 relatif à la campagne en vue du référendum, JORF, 18 mars 2005, p. 4573.
[19] Loi n° 2013-1116 du 6 décembre 2013 portant application de l’article 11 de la Constitution, JORF, 7 décembre 2013, texte n° 3.
[20] Il est simplement renvoyé, à cet égard, aux articles L. 47 à L. 52-3 du Code électoral. Or, les règles fixées à ces articles ont simplement « pour vocation de fixer le cadre imposé à la libre expression des acteurs de la compétition » (Q. Girault, « La campagne référendaire ou l’impensé du droit électoral », art. préc., p. 567). Aucune règle sur la campagne se déroulant sur les médias audiovisuels ou sur le financement de la campagne ne sont par exemple édictées. Une autre question risque également de se poser avec insistance : celle de la régulation des campagnes sur les réseaux sociaux.
[21] La Commissaire du Gouvernement Christine Maugüé semble en effet y avoir ouvert la voie dans ses conclusions sous l’arrêt Sarran, Levacher et autre, reprod. in RFDA, 1998, p. 1087
[22] Selon la jurisprudence classique, CC, n° 62-20 DC, 6 novembre 1962, Loi relative à l’élection du président de la République au suffrage universel direct.
[23] La jurisprudence d’incompétence du Conseil constitutionnel a été confirmée par voie de QPC. V. CC, n° 2014-392 QPC, 25 avril 2014, Province Sud de Nouvelle-Calédonie.
[24] On notera à cet égard que les projets de loi adoptés par référendum ont presque toujours revêtu un contenu normatif très simple. Au regard des thèmes envisagés, on pourrait ici envisager des projets de loi dense contenant de multiples règles juridiques distinctes.
[25] Dans sa décision précitée Hauchemaille et Meyet, puis dans sa décision Hauchemaille et Le Mailloux (CC, n° 2005-37 REF, 25 mai 2005), le Conseil constitutionnel remarque qu’« en tout état de cause », il n’y a pas violation de la Charte de l’environnement, par le Traité établissant une Constitution pour l’Europe dans le premier contentieux, et par le projet de loi de ratification dans le second. Si la formule « en tout état de cause » conserve une part de mystère, le Conseil admet bien nécessairement qu’il peut être compétent pour examiner si le texte soumis au référendum est conforme aux exigences constitutionnelles. En ce sens, v. par ex. M. Fatin-Rouge Stéfanini, « La décision du Conseil constitutionnel du 24 mars 2005, Hauchemaille et Meyet : un nouveau pas en matière de contrôle des référendums », RFDA, 2005, p. 1044.
[26] CC, n° 89-265 DC, 9 janvier 1990, Loi portant amnistie d’infractions commises à l’occasion d’évènements survenus en Nouvelle-Calédonie.
[27] Nous pensons évidemment au terme maladroit et peu clair de « pré-référendum » employé en 2023. L’imprécision sémantique ressurgit lorsque Emmanuel Macron juxtapose le terme de consultation et celui de référendum.
[28] En 1984, François Mitterrand avait en effet proposé de réviser la Constitution pour permettre la tenue de référendums législatifs sur des sujets exclus par l’article 11, alors que la droite parlementaire souhaitait l’organisation d’un référendum sur « l’école libre ». Emmanuel Macron avait effectué un « coup » politique similaire lorsqu’il proposait, en 2020, l’insertion de la protection de l’environnement dans la Constitution. Sur l’analogie soulignée par Dominique Rousseau, v. « Référendum : Macron dans les pas de Mitterrand », Le Point, 17 décembre 2020.
[29] V. l’ordonnance n° 2016-488 du 21 avril 2016 relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement, JORF, 22 avril 2016, texte n° 6. Celle-ci avait ajouté un article L. 123-20 au Code de l’environnement, disposant que : « l’État peut consulter les électeurs d’une aire territoriale déterminée afin de recueillir leur avis sur un projet d’infrastructure ou d’équipement susceptible d’avoir une incidence sur l’environnement dont la réalisation est subordonnée à la délivrance d’une autorisation relevant de sa compétence, y compris après une déclaration d’utilité publique ». La consultation en tant que telle avait ensuite été déclenchée et régie par le décret n° 2016-503 du 23 avril 2016, JORF, 24 avril 2016, texte n° 12.
[30] Par exemple, pour le référendum d’autodétermination des populations des Comores. V. la loi n° 74-965 du 23 novembre 1974 organisant une consultation des populations des Comores, JORF, 24 novembre 1974, p. 11771.
[31] Pour un exemple des critiques adressées au référendum, v. E. Cohen, G. Grunberg, B. Manin, « Le référendum, un instrument défectueux », Le débat, n° 193, 2017, pp. 137-140. Pour une synthèse des critiques « démocratiques » du référendum, v. L. Morel, « Référendum et volonté populaire : la critique démocratique du référendum », Participations, n° 2018/1, n° 20, pp. 53-84.
[32] Selon l’auteur de la tribune précitée, le référendum doit être précédé d’une assemblée citoyenne, les « recommandations qui en émanent » devant ensuite êtres « présentées à l’ensemble de la population », et le « fruit de la concertation » faire « office de guide de gouvernance ». V. D. Van Reyubrouck, « Le « préférendum », arme ultime de décision citoyenne », art. préc.
[33] Sur les potentialités de l’association du référendum avec des mécanismes participatifs et délibératifs, v. M. Fatin-Rouge Stéfanini, « Assemblée citoyenne et référendum : quelques exemples étrangers à méditer », Pouvoirs, n° 175, novembre 2020, pp. 77-88.
[34] Ces deux questions étaient alors posées le même jour. Une première question était ainsi posée : « Voulez-vous que l’Assemblée Nationale, élue ce jour, soit Constituante ? ». La deuxième était formulée en ces termes : « Si le corps électoral a répondu oui à la première question, approuvez-vous que les pouvoirs publics soient, jusqu’à la mise en vigueur de la nouvelle Constitution, organisés conformément au projet ci-contre ? ».
[35] M. Revon, P. Taillon, « Le « préférendum » : entre nouveauté démocratique et référendum déguisé », art. préc.
[36] 51,08 % des suffrages exprimés s’étaient prononcés favorablement, le 26 juin 2016, au projet de transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique sur la commune de Notre-Dame-des-Landes. Ce projet a pourtant été abandonné.
[37] De telles expériences permettent également de relativiser la différence entre référendum consultatif et décisionnel, depuis longtemps soulignée par la doctrine. En ce sens, v. J.-M. Denquin, « Référendums consultatifs », Pouvoirs, n° 77, avril 1996, pp. 81-95.
[38] Le Premier ministre hongrois a, en effet, privilégié à plusieurs reprises les consultations informelles au référendum prévu par la Loi fondamentale, précisément pour s’affranchir des contraintes de ce dernier. En ce sens, v. P.-A. Collot, « Le constitutionnalisme abusif en Hongrie, in P.-A. Collot (dir.), Le constitutionnalisme abusif en Europe, Paris, Mare et Martin, 2023, p. 156 s.